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Élèves en situation de handicap : et si les nouveaux temps et aménagements bénéficiaient à certains d'entre eux (INSHEA – Canopé) ?

Paru dans Scolaire le vendredi 12 juin 2020.

Certes, la situation "met à l'épreuve la société inclusive", mais pourquoi ne pas s'attendre aussi à "des bénéfices secondaires inattendus" pour les élèves en situation de handicap, comme le souligne Anne Chotin, professeure-formatrice de l'INSHEA (Institut national supérieur formation et recherche handicap et enseignements adaptés), alors que le confinement a aussi été à l'origine d'une "modification positive du rapport au temps et à l'espace" ? Cette formatrice intervenait avec une autre professeure de l'INSHEA, Anne Vanbrugghe, le mercredi 27 mai 2020 dans le cadre d'une formation en ligne co-organisée avec Réseau Canopé sur le thème du "retour des élèves en situation de handicap dans une école inclusive". Ce pourrait être, par exemple, des élèves qui deviennent "davantage acteurs dans leur organisation, plus autonomes", "même si les demandes d'aides risquent d'augmenter au départ". Le fait qu'il y ait "plus d'espaces pour se mouvoir" pourrait également se révéler "plus favorable à certains", les enfants en fauteuil par exemple, tout comme "la signalisation au sol" pourrait être davantage utile à des élèves déficients visuels, ajoute Anne Chotin qui imagine aussi les possibles bénéfices induits par le fait d'avoir "plus d'espace dans le temps pour s'organiser et se poser" (petits groupes, alternances en classes, etc.), pour ces élèves à besoins particuliers, mais pas que, dans ce monde qui "va trop vite"...

Pour autant, si on peut imaginer des effets bénéfiques pour certains, cet environnement modifié pourra aussi avoir des effets négatifs, car il "bouleverse des éléments considérés comme invariants pour d'autres", nuance Anne Chotin. La transformation des itinéraires avec les sens de circulation, par exemple, ou encore celle des systèmes qui permettent l'ouverture des portes pourraient être "déstabilisants ou tout au moins source d'inconfort" pour certains enfants. Ce sont ces éléments potentiellement perturbants qui justifient d'ailleurs le webinaire qu'elles ont animé. Les deux formatrices étaient en effet invitées à dresser un état des lieux des obstacles et difficultés rencontrées par les élèves en situation de handicap et à donner des pistes, "dans un contexte sanitaire complexe", sur "les points de vigilance que devront observer les enseignants, les solutions et les leviers possibles qui faciliteront ce retour et permettront de se rassurer et de rassurer l'élève et ses parents". Une réflexion importante, selon Anne Vanbrugghe, car les élèves en situation de handicap sont peu nombreux à être revenus à l'école (soit par peur, soit au motif des difficultés d'application des mesures barrières), alors même que certains ont été "privés d'ouverture au monde" et que ce retour est un "moyen d'accéder à leur identité d'élève". Réflexion importante également, parce que même si "le retour en classe est un droit","en même temps la sécurité physique et affective est une nécessité".

Éducation aux gestes barrières : ne pas faire du "conditionnement" sans compréhension

Anne Vanbrugghe invite d'abord, face à l'injonction d'une "stricte observation des règles sanitaires", à "construire" les nouvelles habitudes (les gestes barrières) "dans la compréhension de ces règles" et à ne pas "rester au stade de l'automatisme, à la seule répétition, au seul conditionnement comportemental". Tout un travail de transformation peut par exemple être mené sur les supports, comme les affiches, qui présentent les gestes barrières. Celle-ci engage notamment à proscrire les formulations négatives pour privilégier des formulations positives (préférer, à des images qui présentent des mains qui se serrent barrées par un trait, des illustrations avec des personnes qui se disent bonjour en se tapant les pieds ou les coudes, ou en se faisant un signe ou un geste de la tête). Elle invite aussi à "fractionner l'information, donc le travail de compréhension, et à réserver une partie de l'information pour un autre moment". Enfin, proposer "une monomodalité" plutôt qu'un message constitué à la fois d'une image, d'une animation et d'un texte, peut se révéler plus efficace, par exemple pour des enfants qui ont des troubles de la concentration.

La seconde formatrice, qui estime de son côté important, dans le cadre des mesures barrières, de ne pas "proscrire le toucher" mais plutôt d'éveiller au "toucher en plein conscience", c'est-à-dire "proprement", a par ailleurs donné des pistes pour apprendre aux élèves à se réapproprier les nouveaux espaces. Cela passe par la mise en œuvre d'activités de repérage pour intégrer les nouveaux périmètres, d'exercices de locomotion ou encore l'utilisation de la technique du guide appliquée pour les déficients visuels en se servant du coude, à condition, précise-t-elle, "d'un lavage rigoureux des mains avant et après la tenue des coudes des guides".

Le rôle important du langage pour travailler sur les peurs

Enfin, pour assurer la sécurité psychique, il s'agira d'être "à l'écoute des élèves, de leurs craintes" et de "jouer un rôle de médiateur d'émotions", conseille encore Anne Vanbrugghe pour qui, à ce titre, "le langage jouera un rôle central".

Ce webinaire, qui a rassemblé plus de 80 participants, s'inscrit dans le cadre du programme de conférences d'experts et de modules d'accompagnement et de formation à distance (webinaires, tutoriels, podcasts, etc.) qui a été développé par Réseau Canopé, à la demande de Jean-Michel Blanquer et en partenariat avec l'Inspection générale et la DGESCO, pour accompagner le retour en classe des enseignants après le confinement. Décliné autour de trois grands thèmes ("les métiers de l'humain" qui abordent la prise en compte de la parole et des émotions des élèves notamment, "faire face à l'hétérogénéité scolaire" pour travailler sur la différenciation, et "nouvelle forme scolaire et articulation présentiel/distanciel" pour travailler sur l'hybridation des cours), ce programme fait suite à deux autres opérations qui ont été menées dès la mi-mars pour répondre à "l'urgence de la continuité pédagogique", explique la directrice générale de Canopé, Marie-Caroline Missir : proposer dans un premier temps des ressources, puis des formations en ligne gratuites depuis une plateforme, CanoTech, opérationnelle dès le 17 mars.

Vers une offre de formation en ligne en direction des LP et autour de l'orientation

Selon la directrice générale de Canopé, "ces formations accessibles en synchrone et en asynchrone (elles sont toutes enregistrées) ont trouvé leur public", puisqu'ils sont environ un millier chaque jour à les suivre. Du 11 mai au 29 mai, 512 sessions dédiées au retour en classe ont été programmées, soit 17 000 heures de formations auxquelles se sont inscrits plus de 20 000 enseignants.

Au départ majoritairement intéressés par des formations concernant les outils numériques et les aspects techniques (comment créer un PDF interactif, un Padlet...), les enseignants ont ensuite, pour 50 % d'entre eux, plébiscité les formations de troisième type (hybridation), organisées pour accompagner le retour en classe. Ils ont massivement suivi celles qui abordent les questions de motivation et d'estime de soi, la façon de repenser la salle de classe et la pédagogie, la classe inversée, le travail sur la différenciation, l'entraide, l'autonomie et le travail sur l'attention et la concentration.

Actuellement, un groupe de travail planche sur une programmation qui sera davantage orientée vers les lycées professionnels et un autre avec l'ONISEP pour développer une offre autour de l'orientation. Canopé mène également une réflexion pour pérenniser cette offre à la rentrée de septembre.

Le programme "Je me forme pour le retour en classe" ici

Camille Pons

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