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Chronique ordinaire des jours extraordinaires - 20 avril

Paru dans Scolaire, Périscolaire le lundi 20 avril 2020.

Z-L, chargée de production, chargée de développement « cinéma », au sein d’une association d’éducation populaire.

La semaine dernière j’écrivais sur ce film qui m’a tend ému. J’exprimais aussi mes doutes sur le sens de mon engagement professionnel autour de la question de la démocratisation culturelle. D’autant que la culture n’a pas l’air d’aimer le confinement : plus de théâtre, plus de cinéma, plus de concert, plus de spectacle… Elle n’aimera surement pas non plus le dé-confinement et mettra du temps à se rétablir. Pourtant de nombreuses choses se mettent en place : visites virtuelles de musée, concerts à écouter, festivals en ligne… Le mouvement Ceméa aussi à voulu contribuer. Après avoir négocié avec les prod’ nous avons été autorisé à poster sur YAKACHEZNOUS – plateforme solidaire d’activités ludiques et pédagogiques -des films en stream gratuit pour les petits, moyens et grands. Et si finalement la culture n’avait jamais été aussi accessible que pendant le confinement ?

La culture est un droit essentiel et fondamental. Mais il n’est pas le seul. L’accès au logement, à l’alimentation, au soin ne sont pas des droits à négliger, et bien que je ne veuille pas faire de hiérarchie des besoins, cela me semble pourtant inévitable. Alors après avoir tenté de rendre la culture un peu plus accessible pendant ce confinement, je m’attaque à d’autres fronts.

A Montpellier, nous travaillons avec le Secours populaire pour l’aide d’urgence alimentaire. Pas notre métier, arrivés à l’entrepôt nous écoutons donc attentivement la coordinatrice bénévole habituée à gérer des crises alimentaires dans des pays en grande pauvreté. Alors : deux sacs cabas par adulte avec condiments, conserves, féculents ; plus un sac hygiène ; pour les enfants, un autre avec du lait, du chocolat, de la confiture. Notre mission est de remplir les camions, et de se rendre sur les lieux de distribution. Nous sommes venus avec les véhicules que nous avons trouvés, le mini van de l’AS du quartier, celui de la MJC de la commune d’à côté et celui de l’association pour l’environnement urbain du coin. Chaîne humaine, il y a 150 cabas à faire rentrer, empiler sans rien faire tomber.

STOP ! La coordinatrice hurle pour un coup de main. Il manque 300 sacs hygiène à faire en urgence pour la livraison de cette après-midi. Pas de problème, toi tu ouvres le sac, moi je mets le shampoing, ma voisine le gel douche, lui la brosse à dent – sac/shampoing/gel douche/brosse à dent/ sac/shampoing/gel douche/brosse à dent. STOP. Les 300 sacs étaient faits et sont déjà partis avec l’asso Tae Kwon Do dans un squat du centre-ville.

On reprend notre chaîne humaine camion. Ca y’est, nous avons nos 300 sacs. Direction les lieux de distribution. Arrivés sur le parking du Zénith, une association nous attend. Bonjour de loin, masque, gèle hydro alcoolique, coup de pschit javel sur les poignées des véhicules. La mairie a apporté des barrières, nous créons donc un stand avec une allée « arrivée » une allée « sortie » pour qu’il n’y ait pas de chevauchement. « Restez avec nous pendant la distribution » dit la directrice de l’association « ça dissuade quand il y a risque de débordement ». L’arrivée des familles doit être échelonnée, elles ont été convoquées tous les quart d’heure. Raté. Les familles arrivent en même temps, nombreuses, avec les enfants, les ados, les plus vieux, certains se pressent, se disputent, disent n’en avoir pas assez, refusent de prendre pour les autres, ceux qui sont restés au camp. Heureusement il y a José, il connaît les familles, leurs noms, leurs langues, les conflits, il ménage la chèvre et le chou pour désamorcer les disputes. Finalement tout le monde aura eu ce qui avait été prévu. Est-ce suffisant ? Nous reviendrons dans deux semaines ici, et dans d’autres lieux, d’autres squats, d’autres bidonvilles.

Alors effectivement c’était éprouvant, mais c’était nouveau, c’était dehors, c’était de nouvelles têtes, de nouvelles associations, de nouvelles façons de travailler et d’être solidaires. Là je ne doute pas de l’utilité. Moi-même je me suis sentie utile… ça fait du bien.

 

 

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