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L'intelligence artificielle pour aborder de manière différenciée au cycle 2 la complexité de la géométrie (Educatec – Educatice)

Paru dans Scolaire le vendredi 29 novembre 2019.

Les éditions Bordas vont proposer, en s'appuyant sur un dispositif d'intelligence artificielle (IA) développé par EvidenceB, start-up EdTech qui développe des logiciels d'activités pédagogiques centrés sur les mathématiques, la maîtrise de la langue et les sciences, des modules qui permettront à des enseignants du cycle 2 de favoriser la pédagogie différenciée dans l'apprentissage des mathématiques, notamment la géométrie. Ces modules doivent enrichir la collection "Les Maths avec Léonie", collection qui propose un apprentissage selon la méthode de Singapour. Alors qu'ils ont été présentés au Salon Educatec – Educatice, qui s'est déroulé du 20 au 22 novembre 2019 à Paris, ces modules seront mis à disposition des enseignants, dès le mois de mars 2020 pour le niveau CE1 et à la rentrée suivante pour les CE2, pour accompagner la construction des notions de repères et de direction et couvrir la partie "(Se) repérer et (se) déplacer en utilisant des repères et des représentations" du thème "Espace et géométrie" des programmes de ce cycle.

Développés avec l'INRIA (Institut national de recherche en informatique et en automatique) durant 5 ans, ces modules ont aussi été testés auprès d'élèves de l'académie de Bordeaux. Des premières études qui "ont montré l'efficacité des algorithmes", précise Gilles Corner, data scientist (IA / machine learning) qui a travaillé sur ce projet avec EvidenceB, même si celui-ci invite à rester mesuré, puisque ces observations ont été faites "dans un contexte précis et avec des ressources précises". Cet algorithme doit d'ailleurs "s'améliorer au fur et à mesure des usages", en s'appuyant sur la poursuite, à la fois des recherches menées en algorithmie, mais aussi des tests pour observer "ce que les élèves apprennent et ce qui marche". Les partenaires envisagent également d'enrichir ces modules "au fil du temps", en ajoutant par exemple des activités permettant de travailler en mode collaboratif.

Augmenter ou diminuer la zone d'apprentissage en fonction des acquis

Le principe du dispositif ? Faire passer les élèves au travers de 7 parcours, composés chacun d'un "test-diagnostic" afin d'identifier "sur quelles notions les élèves sont plus à l'aise ou sur quels supports", et de "banques d'activités". Ces activités sont organisées des plus simples aux plus compliquées et l'IA permet "d'adapter" la fréquence et le temps de passage de chaque élève dans les différents niveaux de ces parcours, en augmentant ou en diminuant la répétition d'exercices ou encore en proposant des activités de remédiation, en fonction du niveau de compréhension atteint par chacun. Cette compréhension est évaluée en prenant en compte les réponses des élèves mais aussi les temps de réalisation. Par exemple, si l'élève avance vite, l'IA augmentera sa zone d'apprentissage et débloquera des niveaux pour le laisser découvrir d'autres concepts.

L'IA pourra proposer également la composition de groupes en fonction de niveaux, sans visée discriminante, selon Gilles Cornec, puisque tous les élèves se verront proposer la "même méthode pour apprendre", et pour tous sera visée "une même maîtrise des notions". Et ces "clusters" pourront aussi évoluer par moments vers des "groupes hétérogènes pour que les élèves se nourrissent aussi d'interactions entre eux", précise-t-il encore.

L'IA permet d'accélérer l'exploration de niveaux plus élevés pour les élèves les plus à l'aise

Autre caractéristique, toutes les leçons proposent des situations "dans lesquelles l'élève peut facilement se projeter". Une de ces activités invite par exemple l'élève à explorer un espace en 3D (une salle de classe par exemple) et à accéder à un objet ou encore à répondre à une tâche, comme distribuer des cahiers le plus vite possible. L'activité vise, par la répétition de l'exercice, à amener l'élève "à construire des stratégies d'orientation" pour aller plus vite, donc à construire ainsi ses concepts en testant des trajets différents.

Avant leur mise à disposition, les modules ont été testés auprès d'élèves de l'académie de Bordeaux. Les résultats de l'un de ces tests, qui comparait l'avancée d'élèves mis dans le cadre d'une situation d'apprentissage classique avec un enseignant avec celle d'élèves avec lesquels était utilisée l'IA, ont d'ailleurs été présentés à cette occasion. La séquence observée portait sur une activité de jeu consacrée à l'apprentissage de l'addition et de la soustraction avec 4 typologies d'exercices et 6 niveaux de difficultés à passer. Dans le groupe dont l'activité avait été accompagnée par l'IA, l'algorithme avait permis aux élèves qui avançaient rapidement d'effectuer moins d'exercices intermédiaires qu'en séquence classique, soit moins d'exercices "mous" et "rasoirs" pour eux, mais aussi d'accéder à un niveau supplémentaire que l'enseignant, tout seul en cours, n'avait pas réussi à leur proposer. À l'inverse, pour les élèves les moins à l'aise, l'IA avait généré davantage de répétitions d'exercices au premier niveau pour leur permettre de consolider les bases.

Un "outil d'aide à la décision" pour l'enseignant

Si le dispositif IA se révèle dans ce cadre plus performant, il ne s'agit pas néanmoins "de remplacer le professeur", mais plutôt de lui offrir "un outil d'aide à la décision" et de lui permettre de "dégager du temps pour de l'accompagnement", précise encore le data scientist. Une enseignante spécialisée et membre du thinktank #LePlusImportant, Sonia Ouadda, a souligné de son côté un autre avantage attribuable à l'IA : permettre de faire travailler des notions à certains enfants qui ont des difficultés, comme celle du déplacement à ceux souffrent de troubles de la latéralité, en dehors du monde physique où la "répétition de maladresses agit sur les émotions et laisse des stigmates". Ainsi, l'IA, en offrant "un détour pédagogique qui leur permet de refaire, reprendre, se tromper...", peut contribuer "à faire progresser les élèves tout en leur faisant gagner en estime de soi". Atout également mis en avant par Gilles Cornec qui souligne que, par ce biais, "les élèves peuvent se tromper sans laisser de traces, ce qui motive davantage les enfants à dépasser les premiers obstacles dans cet enseignement".

Ces atouts de l'IA viennent s'ajouter à ceux de la démarche de Singapour, démarche qui accompagne le passage du monde concret familier aux élèves à une vision abstraite en faisant passer ces derniers par plusieurs temps d'apprentissage, dont la confrontation d'abord aux notions mathématiques par la manipulation d'objets (apprendre par exemple l'addition en manipulant des cubes ou des jetons), puis le remplacement de ces derniers par des images qui les représentent et, une fois que les élèves sont familiarisés avec les concepts de la leçon, un travail seulement à l'aide de chiffres et de symboles. Tout cela en s'appuyant sur l'entraînement et la répétition, ainsi que sur le jeu et des activités ludiques. Emmanuelle Lucazeau, la directrice éditoriale des éditions Bordas proposait d'ailleurs en introduction un résumé des atouts que lui semble offrir cette méthode : "un apprentissage en étant actif, grâce à la manipulation", la possibilité pour l'élève "d'enrichir sa base de stratégies en écoutant le raisonnement des autres élèves", puisqu'il est invité à échanger avec ses pairs, "une croissance de la confiance en soi grâce à une série d'exercices très progressifs et très répétitifs", le "plaisir de découvrir les maths", parce que l'apprentissage se fait en jouant, ce qui permet à l'élève de "dépasser des obstacles cognitifs sans s'en rendre compte".

Camille Pons

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