Les élèves sont des "sujets à émotions", les enseignants aussi (les Cahiers pédagogiques)
Paru dans Scolaire le lundi 11 novembre 2019.
"Le dossier de ce numéro est l’occasion de vérifier que la pédagogie, pour être efficace, ne peut se passer de la prise en compte du sujet et de ses émotions.", prévient Cyril Lascassies à propos du dernier numéro des Cahiers pédagogiques, titré "sujets à émotions". Il ajoute : "puisque nous travaillons avec des êtres humains, n’est-il pas nécessaire de prendre en compte leur état émotionnel du moment ?" Et pour ce faire, ce professeur de mathématiques pose des questions simples à ces élèves, dès leur entrée en classe : "comment allez-vous aujourd’hui ?" ou "êtes-vous prêts à travailler aujourd’hui ?" Quand les réponses à ces questions simples deviennent compliquées, il s'adresse à l’infirmière et au chef d’établissement qui sont ses partenaires professionnels.
Le dossier propose des pistes pédagogiques : la construction d’un jardin pour "apaiser le fond du cœur", le jeu libre utilisé par les maîtres G (rééducateurs spécialisés en réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté) pour établir un espace sécurisé et réservé à des activités non dirigées, le jeu de rôle "Aïe, mets-toi à ma place !", la médiation artistique à destination des élèves allophones, le jeu des enveloppes…
Ces pistes répondent toutes à une des préoccupations soulevées par Rose-Join Lambert, présidente de l’Agsas : "Autant que ce qu’on lui demande d’apprendre, l’élève est préoccupé de savoir si l’autre, enseignant inclus, est son ami ou son ennemi." Cyril Lascassies ajoute : "afin de prendre soin des autres, prenez d’abord soin de vous."
Ce numéro évoque aussi les émotions liées aux savoirs eux-mêmes, car "toutes les disciplines font battre le cœur". C'est ce dont témoigne Stella, élève de 6ème : "L'anglais me fait ressentir de la joie. Je suis contente d’apprendre une autre langue et de la parler… La joie m’aide à faire les choses." Jeanne Moll, enseignante retraitée et présidente d’honneur de l’Agsas, à propos de son expérience de l’apprentissage de l'allemand en tant que collégienne, reprend les mêmes termes que Stella : "j’éprouvais comme un coup de foudre pour cette discipline inconnue." Ce qui vaut pour les langues vaut aussi pour les mathématiques ou l’EPS.
Et l'enseignant doit tenir compte de ses propres émotions. Les stratégies qu'il utilise pour les réguler "peuvent être reprises par ses élèves", estime Mael Vinat, chercheur en psychologie, à la condition, ajoute-t-il "que les enseignants soient suffisamment solides". Le dossier consacre d'ailleurs son dernier chapitre "aux enseignants eux-mêmes, à la gestion de leur stress, à leurs émotions face à une classe ou face à des situations nouvelles".
Le site des Cahiers ici
Hélène Cénat