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Harcèlement moral entre personnels de l'Education nationale : le Conseil d'Etat précise les règles (une analyse d'A. Legrand)

Paru dans Scolaire le lundi 08 juillet 2019.

Les affaires de harcèlement moral mettent souvent en cause des pressions exercées par les autorités hiérarchiques sur leurs subordonnés. Mais elles peuvent aussi se présenter dans l’autre sens et tel est le cas dans un arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 28 juin 2019.

Une proviseure de lycée professionnel avait été nommée dans un établissement de Morsang-sur-Orge et elle y avait, dès sa nomination, constaté "l’existence de pratiques contestables". Sa volonté d’y mettre fin (et peut-être les méthodes utilisées) lui ont valu l’hostilité du personnel et généré un conflit qui s’est terminé par une décision de l’administration de la muter d’office au poste de principal d’un collège de Sartrouvillle. S’estimant victime d’agissements de harcèlement moral de la part de ses personnels et considérant que l’administration n’avait pas pris les mesures pour les faire cesser, elle contestait aussi la mutation d’office, qu’elle jugeait contraire aux dispositions législatives interdisant de prendre des mesures concernant l’affectation à l’égard de fonctionnaires en prenant en considération le fait qu’ils aient subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement moral.

Elle avait donc saisi le TA de Versailles d’une demande d’indemnisation, mais vu celle-ci rejetée. La CAA de Versailles avait confirmé ce jugement, en estimant qu’aucune carence fautive ne pouvait être reprochée à l’administration. Saisi en cassation, le Conseil d’Etat conteste ce point de vue et, estimant que la CAA a commis une erreur de droit, il annule sa décision et lui renvoie l’affaire pour nouvel examen.

Avec son arrêt, le Conseil d’Etat apporte deux précisions importantes en matière de harcèlement moral : d’une part il tire de l’interdiction posée par l’article 6 quinquiès de la loi de 1983 sur les droits et obligations des fonctionnaires que l’un d’entre eux subisse des agissements répétés de harcèlement moral dans l’exercice de ses fonctions l’idée d’une obligation pour l’administration de l’indemniser totalement des préjudices occasionnés par ces agissements, même si elle n’a elle-même commis aucune faute. Dans un système inspiré de celui de l’arrêt Lemonnier de 1918, il en arrive ainsi à rendre l’administration responsable des agissements de ses agents et lui impute une obligation de garantie pour assurer à la victime l’indemnisation de son préjudice.

La notion de faute ne disparaît pas pour autant, dans la mesure où, dès lors que les agissements contestés sont constitutifs d’une faute personnelle d’un ou de plusieurs autres agents publics, l’administration peut mettre en branle à leur égard un processus d’action récursoire inspiré de celui établi depuis l’arrêt Laruelle de 1951. Elle peut, si elle le souhaite, se retourner contre ses agents et demander au juge de la rembourser en imputant à ceux-ci tout ou partie de la réparation versée par elle.

La décision n°415863 du 28 juin ici

 

 

André Legrand

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