Le poids sur les jeunes de la violence sur l'Internet, un ouvrage de Catherine Blaya
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Justice le mercredi 03 avril 2019.
Comment la haine sur Internet affecte-t-elle les adolescents, voire les enfants ? Qui sont les plus susceptibles d’être en contact avec des contenus dangereux ? Et pourquoi eux plus que d’autres ? C'est à ces questions que répond le dernier ouvrage de Catherine Blaya, "Cyberhaine". Actuellement en détachement à Lausanne où elle dirige le "Laboratoire accrochage scolaire et alliances éducatives", l'ancienne présidente de l'Observatoire international de la violence à l'Ecole estime qu' "Internet est malheureusement devenu par certains aspects un diffuseur de haine à caractère raciste, xénophobe, antisémite ou islamophobe" et qu'il peut être aussi un outil de harcèlement, d’escroquerie intellectuelle ou financière.
Or un jeune qui diffuse des infos ou des points de vue plus ou moins personnels sur le web est en quête de statut ou de reconnaissance. Selon Catherine Blaya, il est donc "la victime idéale de la cyberhaine". Anthony, 17 ans, interviewé dans le livre, a parfaitement compris que le cyberespace est devenu un outil privilégié de diffusion de haine, car "il donne l’impression de pouvoir se cacher derrière un anonymat supposé". Pour lui, "derrière un écran, c’est plus facile de dire ce qu’on pense".
Des taupes électroniques
L’auteure met également en avant les techniques des groupes haineux pour attirer les jeunes. Elle appelle cela "un travail de taupe électronique". Elle explique que la haine sur Internet ne provient pas seulement de ces groupes de très organisés tels celui de la fachosphère, mais aussi d’individus isolés souvent empreints de "racisme ordinaire".
Pour les jeunes, hélas, "être exposé à la cyberhaine serait un mal ordinaire, une exposition banale et insidieuse". Malgré cette banalité acceptée, cette exposition n’est pas sans conséquence. L’auteure situe les victimes entre "honte, malaise, colère, humiliation et haine", ce qui explique d'ailleurs que "les victimes de cyberharcèlement sont plus souvent en décrochage scolaire et ont des difficultés à avoir des relations sociales".
Tous les propos tenus par Catherine Blaya s’appuient sur des témoignages de jeunes victimes qui ne peuvent laisser neutres : "j’ai peur pour moi, mais aussi ma famille, car on est menacés", dit l'une d'elles. La chercheuse qui participe à la "Coordination pour l'éducation à la non-violence et à la paix", évoque aussi les moyens de prévenir le phénomène, tout en questionnant l’efficacité des politiques actuelles. Elle a déjà notamment publié "Ados dans le cyberespace : prises de risque et cyberviolence" (De Boeck, 2013)
"Cyberhaine" - Catherine Blaya – Editions nouveau monde – 200 pages – 17,90 euros
Hélène Cénat