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Facebook, msn, jeux vidéos: Comment repenser la psychothérapie des ados à l’ère du virtuel?

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Justice le lundi 22 mars 2010.

Comment les nouvelles technologies ont-elles changé l’adolescence? De quelle manière les thérapeutes d’adolescents peuvent t-ils prendre acte de ces modifications? Serge Tisseron a fait le point sur l’impact du virtuel dans les pratiques psychothérapeutiques, samedi 20 mars, à Paris, dans le cadre du colloque "L’adolescence a changé, elle change", organisé par la Revue Adolescence.

Les nouvelles technologies favorisent le développement d’un univers mental fondé sur l’image, l’immédiateté, le virtuel. L’adolescent confronte le psychothérapeute au commencement d’un nouveau monde. Quatre dimensions sont à repenser, considère Serge Tisseron: Le rapport du jeune à lui-même, le rapport du jeune à l’autre, le rapport du jeune aux images, enfin, le rapport du jeune aux apprentissages. La toile permet d’avoir plusieurs identités. "Un même ado tiendra un blog où tout va bien et un blog où tout va mal. Il pourra par ailleurs incarner différentes personnalités en choisissant dans le même jeu un avatar violent et un personnage de soignant". La toile est également le lieu où se repense l’identité sexuelle. Les garçons peuvent jouer des filles, les filles des garçons. Une manière pour l’ado, selon le psychiatre, de se familiariser avec le sexe opposé.

Cette multiplication des identités rendrait l’adolescent particulièrement sensible au regard de l’autre, autrui lui apparaissant dès lors comme un moyen de validation de ce qu‘il est ou n’est pas. "La revendication adolescente n’est plus 'aimez-moi' mais 'dites-moi qui je suis'. Les jeunes ont le très fort désir de trouver une définition d’eux-mêmes à travers leurs interlocuteurs sur internet", estime le psychiatre, pointant les risques sectaires.

Le virtuel est un monde de tâtonnement, d’essais et d’erreurs, où règne l‘idée d‘une réversibilité. "Le problème est que dans la relation réelle à l‘adulte, beaucoup d’ados appliquent la règle qui fonctionne sur internet, ils jettent le bouchon très loin pour créer le lien rapidement, sans penser qu’un clash peut être irréversible." Serge Tisseron souligne que, concernant les apprentissages, le problème n’était pas le virtuel en soi, mais plutôt le fait que personne ne soit là pour fixer les différences entre les deux mondes. "J’interviens en classe de primaire pour inciter les enseignant à à fixer cette différence. Il faut aussi pointer que sur le net, le système d’encouragement ("essaie encore une fois", applaudissements lors des succès…) n’a rien à voir avec ce qui se passe en classe."

Serge Tisseron invite les thérapeutes à dépathologiser le rapport parfois addictif des jeunes aux écrans. Loin d’être désocialisant, le net peut constituer une manière de contourner l’autorité parentale, de maintenir le lien avec les pairs depuis la chambre, sous la surveillance des adultes. Par ailleurs, les jeunes ne sauraient être réduits à des simples consommateurs d’images. "Ils modifient l’environnement des jeux vidéos, font des captures d’images… Cette non-passivité doit être intégrée par le thérapeute".

A fortiori, le psychiatre estime que les jeux virtuels peuvent renseigner finement le thérapeute sur le monde psychique de l’adolescent : "Il faut lui demander de parler des personnages avec lesquels il joue, quelles sont les alliances importantes pour lui... Le jeune met ainsi en mots sa relation au monde. Ce travail favorise l’activité réflexive." En dernier ressort, le jeu pourrait être une lutte contre des tentations suicidaires. "Je me souviens du cas d’un jeune dont le personnage n’arrêtait pas de mourir. Cet ado imposait une forme de maltraitance à sa propre image, sans doute pour éviter de s’agresser lui-même."

Les autres intervenants de cette journée sont Raymond Cahn, ancien président de la Société psychanalytique de Paris, Daniel Marcelli, François Marty, François Richard, David Le Breton, sociologue, Philippe Jeammet, professeur de pédopsychiatrie, Patrice Huerre, Jean-Yves Le Fourn.

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