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Fermeture d'un collège : la décision du préfet indépendante de la procédure du département (Conseil d'Etat - Une analyse d'A. Legrand))

Paru dans Scolaire le jeudi 26 juillet 2018.

Dans le cadre du partage des compétences organisé par la loi, l’ouverture ou la fermeture d’un collège ne peuvent être décidées qu’au terme d’une procédure complexe, qui fait intervenir d’une part le représentant de l’Etat et, de l’autre, les organes compétents du département et elles exigent l’accord de ces deux autorités (art. L. 421-1 du code de l’éducation).

C’est ce qui s’est produit à l’occasion de la décision prise par le conseil départemental de l’Eure : il avait décidé, d’une part, la fermeture du collège Pierre Mendès-France de Val de Rueil à compter du 1er septembre 2018 et, de l’autre, la réorganisation du réseau des collèges de la communauté d’agglomération seine-Eure. Sur demande du président de l’assemblée départementale, le préfet a donc prononcé la fermeture de l’établissement.

La commune de Val de Rueil, la FCPE départementale, un collectif de divers organismes et plusieurs particuliers ont demandé au juge des référés du TA de Rouen, en premier lieu, de suspendre l’exécution de la délibération du conseil départemental. Les mêmes ont, par ailleurs, adressé au même juge une demande identique concernant l’arrêté préfectoral de fermeture. Ces affaires ont fini par aboutir au Conseil d’Etat, qui apporte, dans deux décisions du 18 juillet 2018 (n° 420043 et 420047), des précisions intéressantes sur l’interprétation des dispositions législatives.

Dans une première ordonnance, concernant la demande présentée contre la délibération du conseil départemental, le Conseil d’Etat rappelle que la procédure met en œuvre un véritable processus de co-décision. Préfet et conseil départemental sont sur un pied d’égalité. Le Conseil censure donc le juge des référés de Rouen pour avoir considéré que la délibération du conseil départemental ne constituait qu’une simple mesure préparatoire de la décision préfectorale de fermeture du collège. Il s’agissait au contraire d’un acte faisant par lui-même grief. Il en résulte que les requérants étaient bien fondés à intenter un recours contre la délibération et que l’ordonnance était entachée d’une erreur de droit et qu’elle devait être annulée.

Décidant d’examiner lui-même la demande en référé, le Conseil d’Etat rejette les arguments invoqués par les requérants. Ceux-ci faisaient en effet valoir l’existence de vices de procédure : la délibération du conseil départemental aurait été prise après une consultation irrégulière du CDEN (conseil départemental de l’éducation nationale) : en effet, l’information préalable des membres de ce conseil avait été très insuffisante, dans la mesure où les nouveaux secteurs de recrutement n’avaient été présentés qu’en cours de séance. Par ailleurs, le CA du collège n’avait pas été consulté, pas plus que le comité technique départemental. Enfin, le département se serait senti à tort lié par la décision prise par l’Etat de limiter à 56 le nombre des collèges du département.

Dans une formule très laconique, le Conseil d’Etat estime qu’aucun de ces moyens "ne parait de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la délibération attaquée". Il appartiendra aux juridictions saisies de préciser cette affirmation à l’occasion de l’examen des requêtes sur le fond. En attendant, l’une des deux conditions nécessaires pour l’octroi de la suspension faisant défaut, le Conseil d’Etat rejette la demande des requérants.

Le second recours portait sur une demande de suspension de l’application de l’arrêté préfectoral. Là aussi, le Conseil rappelle l’indépendance des deux éléments de la procédure. Il souligne que la délibération du conseil départemental "ne constitue pas la base légale de la décision de fermeture prise par l’autorité de l'Etat" et que la décision préfectorale n’est pas prise pour l’application de cette délibération. Compte tenu de cette indépendance des deux décisions, le juge des référés n’a donc pas commis d’erreur de droit en jugeant que les moyens tirés d’une éventuelle irrégularité de cette délibération ne sont pas susceptibles de créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision du préfet.

Rejetant les autres moyens invoqués comme inopérants, le Conseil d’Etat refuse donc de prononcer la suspension de la décision préfectorale.

Les décisions n° ° 420043 et 420047 du mercredi 18 juillet 2018 ici et ici

A noter que les décisions du Conseil d'Etat sont inscrites au recueil Lebon, ce qui témoigne de leur importance

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