CAP - bac pro : de profondes évolutions en cours (Cereq, inspections générales)
Paru dans Scolaire, Orientation le mercredi 04 juillet 2018.
Un rapport des inspections générales de l'Education nationale et un "Bref" du Céreq sur la voie professionnelle sont publiés quasi simultanément et tous deux évoquent un paysage en mutation. Pour le Centre d'étude et de recherches sur les qualifications, "les flux de sortants du secondaire professionnel évoluent assez peu entre l’avant et l’après-réforme [du bac en 3 ans], mais la répartition interne des élèves s’en trouve bouleversée en profondeur" puisque "la disparition du BEP conduit à un doublement des effectifs de bac pro" tandis que ceux de CAP passent augmentent de 15 % environ. Les auteurs du "Bref", estiment que "de nouveaux clivages (...) se font jour à l’issue de l’orientation après la classe de troisième".
Près de 60 % des jeunes qui préparaient un baccalauréat professionnel en 2012-2013 ("la génération 2013") connaissent trois ans plus tard "une trajectoire d’accès durable ou progressif à l’emploi tandis que 21 % se maintiennent aux marges de l’emploi" et que les sortants de CAP "rencontrent plus de difficultés. Mais si, ajoute le Céreq, "les compétences dont attestent les diplômes de la voie professionnelle s’avèrent reconnues
par les employeurs", on assiste actuellement à une inversion de tendance : la proportion de ceux qui exercent un emploi qualifié diminue du côté des bacheliers et augmente du côté des CAP. "Ceci peut s’expliquer par une part plus importante d’apprentis en filière CAP (...). À diplôme donné, l’apprentissage constitue non seulement une protection contre le chômage mais aussi un rempart contre la non-qualification"", du moins pour ceux "auxquels le capital social a ouvert les portes de la formation par apprentissage".
Comment maintenir le diplôme intermédiaire de ceux qui préparent un bac pro ?
Pour leur part, les inspecteurs généraux constatent que "le cycle du baccalauréat professionnel en trois ans s’est affirmé comme une voie de réussite pour une part croissante des élèves qui s’y engagent", mais ils s'intéressent surtout au diplôme intermédiaire, BEP ou CAP. L'introduction récente de la logique des blocs de compétences "pose la question du maintien d’un diplôme intermédiaire". Son efficacité réside, "pour partie", dans sa capacité "à maintenir l’appétence de certains élèves au cours du parcours en trois ans", donc pour la prévention du décrochage tandis qu'un tiers des élèves qui ne parviennent pas au baccalauréat sortent "avec une qualification de niveau V obtenue grâce au DI" (diplôme intermédiaire). Celui-ci fait d'ailleurs "l’objet d‘une évaluation et d’une délivrance identiques à celles des candidats qui préparent directement le diplôme" et devrait donc bénéficier de la même considération.
Toutefois, du côté des enseignants, le dispositif de certification qui s'ajoute aux contrôles en cours de formation du baccalauréat professionnel est jugé "trop lourd, trop complexe et très chronophage". Et du côté des milieux professionnels, le rapport parle d' "incompréhension": "certaines organisations, à l’instar de la FFB [fédération française du bâtiment, ndlr], ont participé à cette création en signalant leur opposition au principe du diplôme intermédiaire (...) La réorientation en CAP des élèves [candidats à un bac pro] en difficulté était à leurs yeux (elle le reste encore aujourd’hui) la réponse. D’autres organisations professionnelles ont tout simplement refusé de travailler à la mise en place de diplômes intermédiaires, à l’image des secteurs de l’hôtellerie-restauration ou encore des industries textiles pour ne citer que deux exemples emblématiques d’une opposition farouche à la disparition du BEP comme formation autonome."
Les inspections générales invitent à "lever tous les implicites qui entourent les formations professionnelles", quand le CAP apparaît "de moins en moins [comme] l'horizon d'une formation", mais comme "un point d'entrée" à compléter par des titres professionnels et des CQP, donc hors du système Education nationale.
Le bref du Céreq, "Trajectoires professionnelles et dynamiques de formation des salariés" ici, le rapport des deux inspections, Certification intermédiaire dans le cycle du baccalauréat professionnel en trois ans, ici