Eduspot : échos d'un débat sur l'Intelligence artificielle et l'individualisation des apprentissages
Paru dans Scolaire le vendredi 16 mars 2018.
Où en est la recherche en intelligence artificielle (IA) et quelles sont ses perspectives d’évolution ? Quelle recherche mettre en place au service des enseignants ? Voici des échos d'une table ronde organisée hier jeudi 15 mars au salon Éduspot. A noter que, lors de l'inauguration du salon, Mathieu Jeandron a tenu à rassurer les participants, le ministère de l'Education nationale n'oublie pas le numérique, qui est "au coeur des réformes" qui ont déjà été lancées ou qui vont l'être. Le DNE (directeur du numérique pour l'éducation) souligne d'ailleurs l'importance du numérique pour la mise en œuvre du baccalauréat, pour comparer les notes obtenues au contrôle continu et celles obtenues à l'examen et intervenir éventuellement, pour la dématérialisation des copies, pour la gestion des banques de sujets standardisés, mais aussi dans le cadre de ce nouvel enseignement des "humanités numériques".
Lors de cette table ronde, Daniel Andler (mathématicien) a souligné que l’intelligence artificielle n’est pas si récente mais qu'elle a connu un nouvel essor avec la mise à disposition "d’immenses bases de données" et d'algorithmes pour aider à les cartographier. Pour lui, nous n’en sommes qu’ "aux prémices de l’usage de ces technologies". Pour les enseignants, elles permettront de bien connaître le niveau de chacun de leurs élèves et de s’adapter "en temps réel". A l'heure actuelle, la plupart des plates-formes permettent aux enseignants de constituer des parcours pour leurs élèves, mais "manuellement" et pour le groupe classe. Un site comme KWYK propose à présent à l’élève un parcours totalement individualisé. Il dispose de données sur 2 millions d’exercices qui sont faits tous les mois.
La nécessaire intégration prof-élève-algorithmes
La question de l’intégration professeur-élève-algorithmes est naturellement convoquée. Se pose d'ailleurs la question de la différence des relations entre l'intelligence artificielle et les sciences cognitives. Tandis que la psychologie du développement veut comprendre comment on apprend, l'IA permet de voir très pragmatiquement "ce qui marche". Daniel Andler précise : "on va modéliser comment l’élève fonctionne et le comparer à d’autres élèves" afin, un peu comme le fait la météo, de prédire des évolutions possibles.
Avec les Mooc par exemple, on dispose de beaucoup de données, de "traces" pour mettre en place des "systèmes linéaires de références standardisés" et regarder ensuite les données d'un individu pour voir comment il a travaillé. Cela pose évidemment la question du "profilage des élèves", d’où la nécessité d’une éthique. Pour Pascal Bringer (Maskott), il s’agit de "tabous" mais "le dialogue permettra de surmonter la peur". Que la garde de ces traces soient confiée à l’Éducation nationale pourrait "donner des garanties" en ce sens.
Se pose aussi la question de l'élève peu motivé. Les outils vont-ils modifier l'image de l'enseignant ? Le logiciel va t-il aider l’élève ou va-t)il faire à sa place. L’algorithme est-il "débrayable" ? Pour Catherine de Vulpillières (EvidenceB), il faut que l’élève puisse dire où il n'a pas compris et l'aider à chercher ce qu’il n’a pas compris, ce qui suppose que l’enseignant se soit approprié la plate forme. Autre risque, que l'on pousse l'élève sur le parcours plutôt que sur le choix d'un parcours. Où veut on emmener l’élève ?
Michel Delachair