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Parcours individualisés au lycée, simplification des programmes, repères annuels... : le programme de travail du CSP (Souâd Ayada)

Paru dans Scolaire, Orientation le mercredi 24 janvier 2018.

Souâd Ayada, qui remplace depuis le 23 novembre 2017 Michel Lussault à la tête du Conseil supérieur des programmes (CSP), a été auditionnée ce mercredi 24 janvier 2018 par la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale. Outre présenter les orientations et priorités à venir pour le CSP, dont "le lissage et la simplification des programmes de la scolarité obligatoire" ou encore l'instauration de repères annuels de progressivité du CP à la 3e, elle a aussi donné des précisions sur le travail qui sera mené par le CSP suite aux recommandations de la mission Mathiot, dont le rapport est remis ce jour au ministre et auquel elle a été associée, puisqu'elle était l'un des deux IGEN qui en était membre. Le travail du CSP donnera la priorité aux connaissances disciplinaires et à l'individualisation des parcours dans ces nouveaux programmes du lycée attendus pour la rentrée 2019. En déclaration liminaire, Souâd Ayada a d'ailleurs souligné la "concordance" de ses deux missions, la première s'achevant ce jour, alors que la seconde "s'inscrira dans la durée" mais poursuivra le travail de la première par l'élaboration des programmes du "futur lycée". Ces travaux démarreront par la mise en place de groupes de travail d'élaboration de ces nouveaux programmes, groupes de travail dont Souâd Ayada veut "qu'ils soient essentiellement composés de professeurs", qui sont "à même de savoir ce qui convient aux élèves".

Concernant les futurs contenus, si la présidente affirme ne pas être en mesure "de dire quelles disciplines seront concernées par la rénovation", elle précise en revanche que ces nouveaux programmes devront "tenir un équilibre ténu" entre, d'une part "la formation intellectuelle et morale des élèves", et d'autre part, "la préparation à l'enseignement supérieur puis, au-delà, à l'insertion professionnelle". "L'échec massif" d'ailleurs observé en première année de licence (près de 60 % des étudiants) orientera selon elle ces programmes dans deux directions, "consolider les connaissances" tout en donnant une place à "une interdisciplinarité intelligente", constat étant que cet échec peut être "interprété de deux manières qui sont liées" : "un manque d'assises des connaissances" et une incapacité à "solliciter les acquis d'autres disciplines". Enfin, parce que, selon elle, l'absence de "maturité" explique aussi cet échec, il faut "concevoir des programmes et des épreuves au bac qui valorisent l'esprit critique" et "la réflexion personnelle argumentée", orientations qui permettraient, en outre, de faire en sorte que l'orientation des élèves soit moins subie.

Individualisation des parcours au lycée

La réforme du lycée s'orientera par ailleurs vers une "individualisation des parcours", précise encore la présidente du CSP. Les élèves pourront opter pour des majeures et des mineures mais il restera un tronc commun, "très important en seconde, un peu moins en première". Une "individualisation" qui n'est donc "pas incompatible avec la constitution d'une culture générale commune". Le travail s'annonce néanmoins "énorme" car, explique-t-elle, il s'agira "pour une même discipline, de concevoir [des parcours, ndlr] quand elle est choisie en majeure, en mineure, en tronc commun, tout en permettant aux élèves de changer de majeure, par exemple, de la première à la terminale".

La présidente du CSP a également évoqué une prise en compte de la continuité des questions de santé, notamment dans les futurs programmes de SVT, et une "articulation avec ce qui existe, notamment le parcours éducatif de santé".

Un grand oral au baccalauréat

Une place plus importante sera par ailleurs accordée à l'expression orale. La présidente du CSP a précisé les contours de la recommandation du rapport Mathiot qui vise à introduire un grand oral au baccalauréat, en épreuve terminale pour les filières générales et technologiques. Préparé dès la première, celui-ci serait conçu comme une "pratique interdisciplinaire" pour laquelle seraient sollicitées les connaissances de deux disciplines "majeures". Il pourrait être conduit, sur trente minutes, en langue étrangère ou encore autour d'œuvres étrangères. Soutenu devant un jury de 3 personnes, dont 2 enseignants au minimum, il permettrait de valider jusqu'à 15 % de la note finale du bac.

Quant au contrôle continu, il devrait concerner 40 % de la note du baccalauréat et être lissé sur la première et la terminale. Pour l'inspectrice générale, "ne pas accepter le contrôle continu", donc de "remettre les professeurs au centre de cette évaluation", "c'est reconduire la défiance" : "celle des élèves à l'égard de leurs professeurs, celle des parents à l'égard de l'institution scolaire". Mais il faut prévoir des "gardes-fous" comme des "conseils d'harmonisation dans les établissements", ou en veillant "à une objectivation de l'évaluation".

Clarifier les programmes déjà "réformés"

Concernant les programmes de scolarité obligatoire, l'autre grande priorité concernera "le lissage et la clarification" des programmes pour lesquels le CSP devrait être, selon Souâd Ayada, saisi très prochainement par le ministre de l'Éducation nationale. "Il ne s'agit pas de proposer de nouveaux contenus", mais "d'ajuster" les "programmes existants" : de travailler sur leur simplification, "d'enlever tout élément de jargon" et "de mettre en perspective ce qui est positif". "Il y a urgence", estime-t-elle, "car les professeurs ne les lisent pas". En parallèle, un autre travail consistera, également à la demande du ministre, à "instaurer des repères annuels de progressivité du CP à la 3e".

Souâd Ayada s'est dite attachée au travail d'évaluation et de révision de ces programmes. "Un programme a une vie : une conception, une mise en œuvre, une évaluation et une révision", a-t-elle déclaré. "Le CSP doit résister à une tendance naturelle, propre à toute instance, qui consiste à sacraliser le résultat de ses travaux (…). Si des maladresses sont signalées dans un programme, il doit être soumis à révision."

Se rapprocher des éditeurs scolaires

Concernant le fonctionnement du CSP, Souâd Ayada est favorable au développement d'une "collaboration féconde" avec les deux autres conseils rattachés au ministère, le CNESCO et le Conseil scientifique de l'Éducation nationale récemment créé, pour mener respectivement avec eux un travail commun autour de la question de l'évaluation et autour des processus d'apprentissage.

Souâd Ayada souhaite aussi opérer un rapprochement avec les éditeurs de manuels scolaires, devenus "les transmetteurs privés, voire uniques des programmes". Il s'agit, selon elle, non "pas de s'immiscer dans des questions de méthodes pédagogiques", mais de "rappeler qu'un manuel est une interprétation d'un programme" et de veiller à ce qu'il "en respecte l'esprit".

La présidente a affirmé également être "tout à fait favorable" à ouvrir "davantage" la composition du CSP "à des chefs d'établissement", "et éventuellement des parents d'élèves". La présence d'enseignants lui semble en revanche plus difficile en raison des contraintes de disponibilités.

Inscrire l'enseignement du fait religieux dans une approche historique critique

Interrogée à plusieurs reprises sur l'enseignement du fait religieux et les relations à venir avec le nouveau conseil des sages de la laïcité, cette philosophe spécialiste de spiritualité islamique a aussi insisté sur la nécessité d'enseigner ce fait religieux en sollicitant toutes les disciplines (littérature, philosophie...) et non pas via "un enseignement frontal", et en respectant "les règles d'une histoire critique". Règles qu'elle ne retrouve pas, par exemple, dans l'enseignement de l'histoire de l'Islam. "Je suis très frappée, pas dans les programmes mais dans les manuels, par les limites de cet enseignement", a-t-elle déclaré. "Il ne respecte pas les règles de l'histoire critique et de contextualisation. On présente par exemple le prophète sans le mettre dans le contexte socio-culturel auquel il appartient." Un enseignement "dogmatique", qui "sacralise", "vise à apaiser" et "flatter", selon elle, et relève davantage "du vivre ensemble" que de l'enseignement.

Par ailleurs, la présidente du CSP invite à "s'accorder sur une définition minimale de la laïcité". Pour elle, il s'agit de "se libérer d'une certaine conception de la laïcité" qui consiste en une "hostilité militante à l'égard des religions" et de la voir plutôt comme "un principe constitutionnel qui permet de faire coexister des libertés et de faire vivre en communauté des individus que tout sépare". Ce qui "suppose une reconnaissance du fait religieux et une connaissance des religions", donc passe par le développement de la formation des enseignants à celle-ci : "une formation de fond" et "pas seulement des kits qui permettent de répondre à des questions".

Pourquoi pas un CAPES d'informatique ?

Souâd Ayada a rappelé par ailleurs la volonté du ministre de redonner davantage de place dans les programmes aux langues anciennes et annoncé la remise prochaine du rapport de Pascal Charvet.

Celle-ci a déclaré par ailleurs, pour l'instant, ne pas être favorable à l'intégration de l'enseignement de la philosophie ni dès le premier degré, ni en lycée professionnel. Parce que, selon elle, l'une des difficultés consistera à "concevoir une évaluation des compétences philosophiques" et donc "orale". En outre, estime-t-elle, cet enseignement "suppose que certaines choses soient acquises : maîtrise rhétorique, procédés argumentatifs, maîtrise de la langue...". Pour elle, il faut encore améliorer tout cela en lycée professionnel pour que cet enseignement "puisse y prendre sa place".

La présidente du CSP ne s'est pas non plus opposée à l'idée de mise en place d'un CAPES d'informatique que réclame notamment le Syntec numérique depuis quelques années. Mais "il s'agira[it] d'un enseignement théorique et non pas d'un enseignement réduit à des usages", a-t-elle précisé. Dans la même logique, elle a indiqué que les programmes d'informatique, et notamment l'enseignement du codage, feraient également l'objet de l'attention du CSP.

Camille Pons

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