"L’éducation populaire a devant elle une sacrée responsabilité". Yann Lasnier (Ouvrage)
Paru dans Périscolaire le mercredi 17 janvier 2018.
"Je me méfie de la glorification du peuple, du populaire. Les universités populaires le sont-elles vraiment ? Les publics des centres culturels des villes populaires sont-ils les habitants ? Combien de politiques faites au nom du populaire n’ont fait que renforcer le poids des élites ?". Yann Lasnier, le secrétaire général de la Fédération Léo Lagrange, souhaite, dans son nouveau livre "Contrepoints", partager sa façon de voir les choses sur les grands sujets de l’environnement auquel il appartient.
"A bientôt 50 ans, dont plus de 30 à exercer dans les métiers du tourisme, de la culture et de l’animation", Yann Lasnier revisite son parcours, son évolution politique, ses lectures et ses influences. Revenant sur Léo Lagrange qui fut sous-secrétaire d’Etat aux sports et à l’organisation des loisirs sous le Front populaire, il considère qu’il "posa en quelques mois les fondements des politiques de sports et de tourisme qui inspirent encore l’action publique".
Un objet de transmission
Constatant que sa "vie professionnelle et militante se confond avec les associations", il souligne : "Notre pays compte 1 300 000 associations, plus de 70 000 se créent chaque année et 16 millions de personnes donnent volontairement de leur temps pour contribuer à les faire vivre. A cela, il faut ajouter les plus de 1,8 million de salariés qui contribuent à l’action de 167 000 associations employeurs". Et pourtant, "le fait associatif reste étranger à nombre de nos concitoyens".
Pour l’auteur, "il est fondamental de faire de la connaissance des associations un objet de transmission éducative dès l’école primaire et tout au long du cursus scolaire et universitaire". A propos de l’éducation populaire, il affirme qu’elle "souffre de la malléabilité de son concept, de sa logique floue. […] Ce que l’on écrit sur elle est bien souvent abscons, inutilement savant, volontairement amphigourique, pompeusement complexe".
Des méthodes éducatives
Pour le secrétaire général de la Fédération Léo Lagrange, l’éducation populaire est "un ensemble de techniques et de méthodes éducatives permettant à un individu de prendre conscience de sa place dans la société et de produire une analyse critique de cette dernière".
Ces techniques visent "à la promotion des individus et luttant contre les phénomènes de reproduction sociale". S’interrogeant sur la place de l’éducation populaire à l’époque d’Internet, des réseaux sociaux, des écrans et des algorithmes, il prévient : "L’éducation populaire a devant elle une sacrée responsabilité, elle ne doit pas attendre l’hypothétique fenêtre de tir que créera l’histoire mais revendiquer le droit de l’écrire maintenant".
Regrettant que "les 11-15 ans désertent massivement, depuis une bonne dizaine d’années les centres de loisirs", il rappelle que la Fédération Léo Lagrange a créé en 2011, les "Hubs Léo" qui rencontrent "un formidable succès tant en matière de maillage territorial que de fréquentation". Altérité, mixité sociale et mixité de genre, respect de l’autre, égalité filles-garçons, éducation aux médias et aux réseaux sociaux… "Nous émancipons en aidant à devenir soi, à maîtriser son temps, ses loisirs en développant la capacité à se projeter dans l’avenir personnel et professionnel". Pour Yann Lasnier, "l’éducation citoyenne doit être au cœur, et de la commune, de la ville, du quartier et faire fleurir les initiatives permettant cette réappropriation de la res publica".
"Contrepoints", Yann Lasnier, Editions Léo Lagrange/Esprit Libre, 8€.