Parcoursup sous le feu des critiques syndicales
Paru dans Scolaire, Orientation le mardi 16 janvier 2018.
Dans un communiqué commun, la FSU, les fédérations CGT, FO et SUD de l'éducation, les organisations étudiantes et lycéennes UNEF, Solidaires, SGL et UNL dénoncent au lendemain de l'ouverture de la plateforme Parcoursup, une réforme "mal préparée" qui "cache la mise en place de la sélection à l'entrée de l'université" et en demandent l'arrêt : elle est "inapplicable" mais "déjà imposée dans les lycées et universités en dehors de tout cadre légal" puisque la loi n'a pas encore été votée. Les signataires demandent un "investissement massif dans l'éducation", soit 2 Mds€/an, "dix fois plus que l'investissement proposé par le gouvernement pour cinq ans". Les organisations signataires estiment aussi que le système va engendrer "d'interminables listes d'attente" tandis que les universités vont "sélectionner" les candidat·es : "le gouvernement ne fait que transférer les difficultés [d'APB] vers les établissements". Quant aux attendus locaux, "de plus en plus de composantes des universités annoncent les boycotter, n'ayant ni les moyens ni la volonté de classer les milliers de candidatures qu'elles s'apprêtent à recevoir". Elles seront d'ailleurs amenées à créer "leurs propres algorithmes locaux, tournant selon des critères occultes sur la base des notes, des filières du bac (ou des modules suivis en lycée), voire des lycées fréquentés, ou dans le flou le plus total en mettant en avant un melting-pot de compétences et de qualités comportementales". Pour les signataires, "cette réforme est cohérente avec celle du bac et du lycée modulaire" qui va "démultiplier des parcours étroitement corrélés aux attendus du supérieur et choisis dès la classe de seconde".
Pour leur part, la CFDT, l'UNSA et la FAGE ont présenté au CNESER une motion commune estimant que les attendus nationaux ont été "rédigés dans la précipitation", sans "consultation réelle" ni cadrage national "voire cadrage au sein d’un même établissement" tandis que "la mise en place des parcours d’accompagnements personnalisés est largement remise en cause pour cette rentrée 2018, puisqu’ils ne sont toujours pas organisés et que les moyens matériels, humains et financiers ne sont pas suffisants pour permettre aux universités de se les approprier". De plus, "la mise en place de capacités d’accueil, la croissance du nombre de bacheliers et la multiplication des vœux (non hiérarchisés) risquent de transformer des filières ouvertes en filières sélectives". Les risques de dysfonctionnement sont importants". Les signataires demandent "un plan d’urgence de création d’emplois statutaires".
S'agissant des "attendus nationaux", le SNALC en avait publié avant les vacances de Noël une critique. Il estimait bonne la qualité des attendus des licences scientifiques, mais le syndicat FGAF des lycées et collège déplorait "les formulations très imprécises et copiées-collées d'une licence à l'autre pour tout le domaine des sciences humaines et sociales, ainsi qu'un manque flagrant de coordination entre les différents champs" disciplinaires.
La fédération SUD éducation va plus loin, dénonçant "un mensonge" du gouvernement: Il n'est pas vrai que "tous les dossiers des candidat.e.s ser[ont] examinés de façon qualitative par les établissements d’enseignement supérieur. De plus, le gouvernement vient de repousser au 6 mars la date limite pour publier les attendus locaux, qui "ne seront donc connus des élèves qu’une semaine avant la date de clôture des vœux" le 13 mars. La fédération demande un plan d’urgence financé à hauteur de 3 Mds€/an sur dix ans.
Quant au SGEN-CFDT, il rappelle que le projet de loi de finances initial ne prévoyait pour l'enseignement supérieur "ni postes, ni augmentation du budget". Finalement, 25 M€ ont été débloqués, dont la moitié pour "la prise en charge des surcoûts d'enseignement", 7 M€ sur appels à projets pour de l'investissement, 6 M€ pour les dépenses liées à la gestion des dossiers. L'organisation syndicale "demande que la plus grande transparence soit faite quant à l'utilisation de ces moyens", dont elle estime qu'ils sont insuffisants, d'autant que "des décennies d'abandon des universités par l'Etat ne se rattrapent pas en un an". Elle "revendique 1 milliard d'euros supplémentaires par an".
A noter que la FAGE met en cause l'Onisep et le contenu du site Terminales 2017/2018 dans un communiqué distinct de la motion présentée au CNESER avec le SGEN-CFDT et l'UNSA. Le site "propose notamment des fiches métiers" qui véhiculent "des clichés dégradants envers les professions" : "La légèreté et l’inexactitude des informations proposées par l’Onisep nous amène à remettre en question ses compétences et sa pertinence comme acteur de l’orientation des jeunes." L'opérateur n'aurait pas "la vision et les moyens requis pour orienter efficacement les jeunes".