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Même pour les exclusions temporaires, une procédure contradictoire s'impose (Conseil d'Etat, une analyse d'A. Legrand)

Paru dans Scolaire le jeudi 07 décembre 2017.

Le régime disciplinaire des élèves de l’enseignement agricole, régi par les articles R. 811-28 et R. 811-30 du code rural et de la pêche maritime ne diffère guère de celui qui est en place à l’Education nationale, prévu par les articles R 511-12 à R. 511-13 du code de l’éducation.

Des deux côtés, l’échelle des sanctions est la même et elle comporte pour l’essentiel quatre niveaux : avertissement, blâme, exclusion temporaire de l’établissement ou d’un ou plusieurs de ses services annexes (internat, demi-pension), de huit jours maximum à l’EN ou d’un mois à l’Agriculture, exclusion définitive. Des deux côtés, le chef d’établissement peut prononcer seul les sanctions les plus basses, de l’avertissement à l’exclusion temporaire jusqu’à une exclusion de huit jours : c’est par exemple ce que prévoit le cinquième alinéa de l’article R. 511-30 du code rural. En revanche, l’exclusion définitive relève de la compétence exclusive d’un conseil disciplinaire.

Le Conseil d'Etat rejette le recours 

L’association Droits des lycéens contestait le libellé de l’alinéa précité : elle lui reprochait son imprécision sur la procédure à suivre à l’occasion du prononcé des sanctions prononcées par le chef d’établissement statuant seul. Elle a donc demandé au Premier ministre d’abroger l’article et de prendre un nouveau décret, prévoyant expressément le caractère contradictoire des procédures disciplinaires conduites par le seul chef d’établissement. N’ayant pas reçu de réponse, elle a saisi le Conseil d’Etat d’un recours pour faire annuler ce refus implicite.

Le Conseil rejette le recours. D’une part, constate-t-il, le texte incriminé n’a pas pour objet de régir le déroulement des procédures disciplinaires : il vise simplement à définir les compétences du chef de l’EPLEFPA ; elles ne font donc pas obstacle à l’application des droits de la défense à l’occasion de ces procédures.

Le principe des droits de la défense constitue un principe général du droit

Surtout, suivant une jurisprudence constante, le principe des droits de la défense constitue un principe général du droit, applicable à toute décision individuelle défavorable et prise en considération de la personne même en l’absence de texte. Cette règle, issue en droite ligne du célèbre arrêt Dame veuve Trompier-Gravier, rendu en 1944, s’applique de façon privilégiée à toutes les procédures visant à infliger une sanction : le chef d’établissement doit obligatoirement mettre en place une procédure contradictoire avant toute sanction. Prévu de manière générale dans les circulaires applicables à la matière,et rappelé par la justice administrative, en particulier en 2016, ce principe est donc naturellement applicable à celles prévues par les dispositions du code rural pour les élèves, stagiaires et des apprentis des EPLEFLA.

Elle l’est d’autant plus que ces sanctions sont aussi soumises à un certain nombre des règles de nature législative, désormais établies par le code des relations entre l’administration et le public : l’article L. 211-2 imposant une obligation de motivation à toutes les décisions individuelles défavorables et les articles L. 121-1, L. 121-2 et L. 121-3 fixant la liste des décisions soumises au respect d’une procédure contradictoire préalable et en définissant les modalités.

La modification demande était donc sans objet et sans utilité, s’agissant de règles par ailleurs bien établies.

 

André Legrand

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