Individualisation de l’enseignement: un projet paradoxal? (Françoise Clerc)
Paru dans Scolaire, Orientation le jeudi 18 février 2010.
"Socialement, la classe est un OVNI : elle constitue un collectif où chacun est censé
fonctionner de façon individualisée, une sorte de collectif individualiste". Avec cette formule, Françoise Clerc (Université Lumière-Lyon II), résume toute la complexité de la demande d’individualisation de l’enseignement. Dans un entretien accordé à la revue XYZep, (revue publiée par l’inrp), elle repense la place de l’école dans une société où d’une part, l’interdépendance entre les individus est de plus en plus forte, d’autre part "la conscience de soi ne cesse de grandir".
Le travail de l’enseignant serait de jongler ainsi avec deux paradigmes: considérer l‘élève dans son individualité et créer du collectif. Avec un lot certain d’écueils, considère F. Clerc: Travaillant avec un élève particulier, le professeur ne doit-il pas toujours se préoccuper du groupe qu’il ne peut mettre entre parenthèses? Faisant face à une diversité d‘élèves, ne doit-il pas gérer sa tendance à s’adresser de préférence à "son idéal type"? Individualiser l’enseignement serait prendre en compte le parcours, l’histoire, la culture, la trajectoire personnelle de chacun des élèves, ce qui sous-entend des compétences de flexibilité et d‘adaptabilité.
Dans un second temps, Françoise Clerc rappelle que si la maîtrise et l’évaluation des savoirs relèvent de processus individuels, la construction des connaissances est de l'ordre du collectif. "L’apprentissage doit être compris comme la socialisation de la pensée. On n’apprend pas tout seul. Les élèves inscrivent leurs itinéraires particuliers à travers des dispositions curriculaires communes".
L’auteure pose aussi les questions de l’orientation et de la trajectoire scolaire, qu’elle renvoie à l'individuel. "Sur le marché du travail, l’émergence des compétences met l’accent sur l’adaptabilité et la responsabilité individuelle". Dans la perspective de préparer les élèves à la nouvelle donne économique et sociale, Françoise Clerc considère que le socle commun devrait cesser d’être défini comme une finalité de l’enseignement obligatoire. Bien plutôt, il devrait "définir, comme en Belgique, des références pour accompagner la progression des parcours pendant toute la scolarité obligatoire".
Le dossier complet de l’XYZep, n°35, à ce lien.