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Prévention du décrochage scolaire : l'IFE lance une plateforme de soutien au travail collaboratif intermétiers

Paru dans Scolaire, Orientation le jeudi 30 novembre 2017.

L'IFE (Institut français de l'éducation) a lancé officiellement le 17 octobre 2017 la plateforme européenne TITA (Team cooperation to fight early school leaving, Training, Innovative Tools and Actions), développée avec des partenaires de cinq autres pays européens, la Suisse, le Luxembourg, l'Espagne, la Slovénie et la Hongrie. Cette plateforme a pour vocation de proposer des ressources aux professionnels de tous métiers qui interviennent sur la prévention du décrochage scolaire, ressources destinées à "susciter de l'autoréflexion, de l'analyse et doit permettre à des collectifs intermétiers d'imaginer des scénarios pour répondre à trois grandes problématiques qui ont été identifiées sur le terrain et auxquelles sont confrontés les professionnels", explique à ToutEduc Marie-Claire Thomas, coordinatrice de la plateforme. "Garder ou laisser partir l'élève ; prendre une décision collective ou décider seul du devenir d'un élève ; rester dans le secret professionnel ou partager des informations, dernière problématique qui suscite beaucoup de controverses." Parmi les ressources proposées, figurent notamment des vidéos-formations qui présentent des pratiques filmées en conditions réelles dans des établissements, et, pour chaque grande problématique, des autoanalyses des professionnels qui ont été filmés, des analyses qu'ils font des postures d'autres professionnels et des points de vue d'experts.

À l'origine du projet, retenu par la commission européenne et accompagné durant 4 ans avec un financement de l'ordre d'un peu plus d'1 million d'euro, un rapport européen de novembre 2013 sur le processus de décrochage scolaire : "celui-ci préconisait notamment de promouvoir et d'accompagner ce travail collaboratif pluriprofessionnel", poursuit Marie-Claire Thomas. "Travail encore difficile à mettre en œuvre, du fait de cultures professionnelles différentes entre infirmiers, assistants sociaux, enseignants, CPE, chefs d'établissements..., et qui peuvent même parfois faire émerger des conflits". Le rapport préconisait aussi de réaliser une base de connaissances sur le décrochage et de favoriser une meilleure compréhension du phénomène du décrochage en formation initiale et continue des acteurs locaux, en particulier des enseignants.

La vidéo-formation pour susciter la réflexion, l'analyse puis des scénarios collectifs

Le développement de la plateforme s'est d'abord appuyé sur une expérimentation menée dans 150 collèges et lycées de 3 pays, Suisse, Luxembourg et France (une dizaine dans l'académie de Lyon). Des formateurs y ont filmé, durant un peu plus d'un an, en 2015-2016, des équipes en charge de la prévention du décrochage, notamment les GPDS (Groupes de prévention du décrochage scolaire). "Il s'agissait de filmer les équipes en situation réelle de travail, d'observer comment ils travaillaient, les freins, les leviers...", précise la cheffe de projet, Sarah Levin. "Ces vidéos étaient ensuite montrées aux personnels pour susciter une autoanalyse de leurs postures. Une seconde série de vidéos les montrent ensuite analysant, orientés par un professionnel extérieur, celles d'autres personnels avec qui ils ont travaillé. Auto-confrontations et allo-confrontations qui ont alimenté progressivement la plateforme en même temps que se menait l'expérimentation."

Le projet s'appuie sur un concept développé par deux chercheurs, Simon Flandin et Luc Ria, qui ont développé dans le cadre d'une recherche-action une plateforme de ressources vidéo "NéoPass@ction" avec et pour des enseignants débutants. Le principe : l'analyse in situ et la modélisation du travail réel des enseignants, puis la conception d'un artefact articulant des vidéos de classe et d'entretiens et des textes explicatifs (la plateforme), et enfin l'évaluation du dispositif dans ses usages en formation, la plateforme constituant un outil au service de cette dernière.

À chaque problématique un avis d'expert

Pour TITA, à ces trois types de vidéos, film de l'activité en collectif, auto-confrontation puis allo-confrontation, s'ajoute une vidéo "d'expert". Le chercheur spécialisé en sciences de l'éducation Eirick Prairat a par exemple été sollicité sur la question de la transmission des informations. "Il y parle de l'importance de la déontologie professionnelle, pointe les questions sur lesquelles il estime qu'il faut être transparent et met en avant la vertu du tact", explique Marie-Claire Thomas. "On ne donne pas de solutions mais on propose des réflexions. L'ensemble de ces vidéos doit les amener à réfléchir à leurs propres postures, à comprendre l'autre, son métier. Il n'y a pas de bonne réponse, ce sont les collectifs qui peuvent trouver ensemble les solutions." Et ce recul sur leurs pratiques "permet aussi de lever des tensions", observe encore la coordinatrice du projet. "Cela permet par exemple aux enseignants de comprendre les obligations très strictes du secret professionnel et de réfléchir à une position plus médiane."

Au total, environ 200 vidéos bilingues anglais-français de 3 à 7 minutes, déclinées sur les trois thèmes (avec un nombre d'activités différent selon les thèmes), sont aujourd'hui accessibles. Mais exclusivement à des personnels de l'Éducation nationale. "Il y a une question de droit à l'image", explique Marie-Claire Thomas. "Les personnels ont accepté de se laisser filmer, regarder, analyser... c'est courageux. D'où cette restriction d'accès. Et les personnes inscrites sur la plateforme doivent accepter une charte de déontologie très stricte qui ne les autorise pas, par exemple, à porter des jugements sur les postures, juste à les analyser."

Former à utiliser la plateforme et ses ressources dans les académies

Parce que la plateforme ne constitue néanmoins "qu'un outil de formation", succède à son lancement une phase qui va consister à "faire connaître l'outil et à former à son usage". Trois premières sessions de formations ont déjà été programmées, en partenariat avec le ministère, partenaire du projet européen et qui finance actuellement les heures des formateurs qui animent ces dernières. L'IFE a déjà organisé une session les 16 et 17 novembre derniers auprès de référents décrochage, chefs d'établissements, CPE, inspecteurs d'académie qui représentaient une quinzaine d'académies, session qui sera reproduite les 29 et 30 mars 2018. Une formation, dédiée exclusivement aux référents décrochage, est par ailleurs programmée en février 2018 à l'ESEN (École supérieure de l'éducation nationale), en partenariat avec la DGESCO.

La plateforme propose d'autres ressources : une base de données scientifiques, une cartographie de chercheurs qui travaillent sur ces questions (qui recense à ce jour plus de 150 chercheurs), un lexique qui présente les métiers et les sigles ou encore une formation en ligne MOOC, en espagnol, dédiée à la prévention et à l'action contre le décrochage scolaire. Le projet doit aussi donner lieu, d'ici la fin de l'année, à la publication d'une analyse comparative des pratiques observées durant l'expérimentation et de l'impact de celles-ci. Cette analyse a été effectuée par des chercheurs ergonomes du CEREQ (Centre d'études et de recherches sur les qualifications), également partenaire du projet.

Le site ici

Camille Pons

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