Les RASED sont des "collaboratoires" (colloque de la FNAME)
Paru dans Scolaire le mardi 10 octobre 2017.
Le colloque de la FNAME s'est ouvert le 5 octobre alors que le ministre de l'Education nationale venait d'évoquer son désir de réorganiser les RASED*, dont les "maîtres E" sont une des composantes, et que Le Monde titrait sur "la guerre" des neurosciences et des pédagogues.
Thérèse Auzou-Caillemet, présidente de la "Fédération nationale des maîtres E" : Nous ne nous attendions pas du tout à ce climat polémique. Nous avons travaillé pendant deux ans sur notre programme centré sur "les acquis de la recherche" pour la compréhension des processus d'apprentissage, "des premiers pédagogues aux neurosciences". Pour nous, il n'y a pas d'opposition. En ce qui concerne l'avenir des RASED, nous venons d'adresser un courrier au ministre pour demander un rendez-vous, mais les participants étaient inquiets.
ToutEduc : Qui avez-vous rassemblé ?
Thérèse Auzou-Caillemet : Près de 1 200 personnes, beaucoup de maîtres E bien sûr, il y en quelque 4 600 en France, dont un quart d'adhérents à la FNAME, mais aussi des maîtres G et des psychologues scolaires, qui travaillent avec nous dans les RASED, des conseillers pédagogiques, des inspecteurs et même le directeur de l'académie de Paris...
ToutEduc : Vous aviez de nombreux intervenants et 7 conférences pleinières en 2 jours, c'est beaucoup. Votre public a-t-il suivi ?
Thérèse Auzou-Caillemet : Oui. Il avait ce refus d'entrer dans la polémique, mais au contraire de se saisir de tout ce qui peut nous être utile pour comprendre les difficultés des enfants, pour apprendre et pour réfléchir. D'ailleurs, il n'y a pas un seul conférencier qui n'ait fait référence à notre pratique. Viviane Bouysse, l'inspectrice générale qui a conclu le colloque a fait référence à tout ce qu'elle avait entendu pendant deux jours, évoqué "la relation compliquée" entre recherche et enseignement, mais elle a aussi transmis l'idée d'une exigence bienveillante, elle a contribué à donner une dimension morale aux relations que nous avons avec les enfants, avec nos collègues enseignants, avec les parents... Et les maîtres E y sont très sensibles.
ToutEduc : Que pouvez-vous dire des autres conférenciers ?
Thérèse Auzou-Caillemet : Olivier Houdé (Paris V) nous a parlé de "l'inhibition cognitive", que nous rencontrons tous les jours dans notre pratique. Ange Ansour (les "savanturiers") et François Taddei (le CRI) nous ont mis en position de chercheurs, nous amenant à articuler le plaisir de la curiosité et la rigueur scientifique, et ils nous ont proposé le néologisme "collaboratoire" qui pourrait caractériser un RASED. André Giordan (université de Genève) a montré que l'erreur était inhérente aux apprentissages et Daniel Favre (université de Montpellier) a insisté sur ce moment d'extrême fragilité où on cherche et où on ne sait pas encore qu'on va réussir ... et où il vaut mieux éviter les évaluations. Alain Pouhet (médecin) et Michèle Cerisier-Pouhet (psychologue) nous ont donné des outils pour savoir que faire face aux "dys". Philippe Meirieu (Lyon 2), revenant sur l'histoire de la pédagogie, a donné des fondements à la philosophie de l'éducation.
ToutEduc : Et que retenez-vous ?
Thérèse Auzou-Caillemet : Nous avons pu, effectivement, nous situer au-dessus des polémiques, en sortir par le haut et c'était important pour les maîtres E dont le sérieux et le souci de mettre l'enfant en difficulté d'apprentissage au coeur de ses préoccupations, de se saisir de tout ce qui peut y contribuer, outils ou réflexions, est une dimension importante de ces deux journées.
* Les RASED sont les "réseaux d'aide aux élèves en difficulté"