L’ "ancrochage" pour décrocher du décrochage, dans l'enseignement agricole (ouvrage)
Paru dans Scolaire, Orientation le mardi 10 octobre 2017.
"Ancrer, c’est créer les conditions pour que les élèves soient accueillis, trouvent leur place dans l’établissement et s’y sentent bien ; accrocher, c’est veiller à les mobiliser sur leurs apprentissages, en les intéressant, en allant les chercher ‘là où ils sont’ pour les amener là où ils n’auraient pas pu aller seuls". D’où le néologisme "ancrochage", thème d’une recherche-action, initiée en 2012 par le ministère de l’agriculture, et dont les résultats viennent d’être publiés dans un ouvrage collectif intitulé "L’ancrochage scolaire, une façon singulière de faire réussir les élèves".
Neuf établissements volontaires de l’enseignement agricole publics et privés se sont engagés dans cette recherche afin "de mettre en lumière les stratégies qu’ils développent pour contribuer aux réussites (au pluriel : scolaire, sociale, professionnelle) des élèves". Il s’agissait de regarder ce que les équipes déclarent "faire bien", un "changement de regard qui est loin d’être anodin", soulignent les auteurs.
Les facteurs de l’ancrochage
"Au départ, l’ancrochage a fait rire. Certains y voyaient un terme pédant qui visait à réinventer l’eau tiède, à faire du marketing éducatif, d’autres lui trouvaient un côté joyeux, mi- sérieux mi-poétique. Et puis, il a été repris, il s’est installé au-delà même des équipes impliquées dans la recherche-action." Dans chaque établissement, on s’est interrogé sur "ce qui fait venir, fait rester et fait grandir les apprenants".
Selon l’enquête, trois raisons principales déterminent le choix d’un établissement : la proximité géographique, la filière et la tradition. Auxquelles s’ajoutent les journées portes ouvertes, la qualité du site et les projets. Plusieurs facteurs interagissent pour "ancrocher" les apprenants : la dimension humaine des établissements, le caractère rural et relativement isolé, la présence d’un internat, l’animation socioculturelle, la présence d’une ferme pédagogique ou l’entrée réelle dans le métier.
Une nouvelle dynamique
Pour mettre en œuvre la dynamique de l’ancrochage, l’ouvrage propose une série de recommandations autour de la qualité de l’accueil, des relations sociales, de l’enseignement et la prise en compte de l’insertion professionnelle. Il met aussi à la disposition des équipes une série d’outils aux noms particulièrement imagés comme "l’arbre de l’ancrochage", "la cible" ou "le métier à tisser", ainsi que des témoignages qui illustrent la diversité des actions possibles.
Pour Patrick Mayen, professeur en sciences de l’éducation à l’université de Bourgogne-Franche-Comté et à AgroSup Dijon, les équipes qui se sont engagées dans cette approche positive "ont, en somme, pu décrocher du décrochage et adhérer à l’accrochage et à l’ancrochage et étendre leur réflexion et leur action, non pas seulement à ce qui permet de compenser, corriger, éviter le décrochage, mais à ce qui favorise l’ancrochage et qui, en même temps est bon pour tous et pour la qualité de l’enseignement et de la formation".
"L’ancrochage scolaire, une façon singulière de faire réussir les élèves", Educagri éditions, 18€.
Colette Pâris