Cinéma, philosophie et éducation à Grenoble
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture le dimanche 07 février 2010.
La Maison des enseignants de Grenoble a inscrit "le bonheur" comme thème de la 3ème Biennale Cinéduc (du 1 au 10 février 2010). Pour Monique Vuaillat, qui la préside, cette édition poursuit le travail commencé en 2006 avec "Ecole et société" (2006) et "La famille dans tous ses états" (2008).
Monique Vuaillat : Nous sommes toujours dans notre préoccupation de départ: le souci de montrer comment les cinéastes de différents pays et de différentes époques, ont perçu des domaines ou des thématiques qui sont en relation avec l’Ecole. En 2008, nous avions proposé de découvrir comment le cinéma mettait en scène le rôle éducatif de la famille à travers les âges et les frontières. Pour celle-ci, outre le fait que le thème du bonheur est "inscrit" en classe de philosophie, il est évident qu’il correspond à une interrogation qui concerne aussi bien les jeunes que les adultes. Car l’esprit des Biennale, c’est de toucher les scolaires, les étudiants, mais également le grand public.
ToutEduc: Comment construisez vous votre programmation?
MV: Dans notre programmation, nous avons le souci de faire découvrir des œuvres peu connues, parfois même inédites, comme ce film chinois "La Tisseuse" , une avant-première que nous avons proposée en ouverture cette année ; ou faire redécouvrir de grands classiques comme "Miracle à Milan" de De Sica ou "La vie est belle" de Capra, ou des œuvres devenues "rares", comme "California dreamin’", un peu oubliées comme "Pain, tulipes et comédie" de Soldini… Une programmation que nous avons voulue très variée et que nous avons "classée" en sous – thématiques : "le bonheur dans l’assiette", "le bonheur dans la tête", "à la recherche du bonheur perdu", "bonheur et utopie", "le bonheur est-il moral"…."
ToutEduc: Comment se prépare une biennale?
MV: La continuité des Biennales, c’est aussi ces deux années où l’on prépare la prochaine, où les établissements sont déjà impliqués dans de nombreux ateliers. Je citerai ceux sur les critiques de film : les élèves visionnent 3 films et en font l’analyse, dans le cadre de travaux de groupe supervisés par leurs enseignants assistés de journalistes. Les élèves auteurs des meilleures critiques sont retenus pour aller au festival de Cannes, où ils ont à poursuivre leur travail de "critique" ; 9 lauréats ont pu y aller l’an dernier, ils seront encore 9 en mai prochain. Autres ateliers, qui ont donné lieu à un concours : la réalisation d’affiches pour annoncer la Biennale. Sept établissements ont présenté leurs projets ; c’est finalement l’affiche d’un élève de BEP arts appliqués (du lycée Argouges de Grenoble) qui a été retenue, et c’est elle qui est devenue l’affiche officielle de la Biennale 2010."
ToutEduc: Combien d'élèves sont-ils impliqués?
MV: Au total, 50 établissements et 100 classes, y compris les ateliers qui se déroulent pendant la Biennale : de synchronisation – réaliser une bande son sur un petit film – où se sont inscrits des classes de 3° ; sur le cadrage pour des classes de 1°, ou encore de construction d’une séquence de film - de l’invention d’un scénario au tournage – où se sont inscrits des classes de 6° et de BTS. Ces ateliers sont bien sûr animés par des professionnels du cinéma.
ToutEduc: Donnez-nous quelques exemples du fonctionnement de la Biennale…
MV. Après la journée italienne au CRDP, organisée avec l’Institut culturel italien, nous avons organisé aujourd’hui, à Villard Bonnot, près de Grenoble) une journée afghane, avec trois films, "Le cahier", "L’enfant de Kaboul" et "Niloofar", accompagnés d'un débat avec Nafi Nassim (auteur de "De Kaboul à Marseille") et le philosophe M. Tourneux. Un déjeuner afghan sera suivi d’un défilé d’élèves en costumes traditionnels. Le lendemain nous aurons une conférence sur le plaisir d’être, par le sociologue Michel Maffesoli, entre les projections de "Tous les autres s’appellent Ali", "Bonheur et différences" (courts-métrages) et "Alexandre de bienheureux". Mais aussi des films qui décapent comme "Jamon, Jamon" de Bigas Luna, "Rien que pour vos cheveux" de Dennis Dugan ou "Eternel sunshine of spotless mind de Gondry" …mais je ne peux pas tous les citer.
Monique Vuaillat (à gauche sur la photo) a été secrétaire générale du SNES et co-secrétaire générale de la FSU. Elle est accompagnée de Mireille Cazeneuve (qui coordonne les ateliers).