Les maisons familiales rurales fêtent leurs 80 ans
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le vendredi 07 juillet 2017.
"La première fois que j'ai rencontré les MFR [maisons familiales rurales], deux choses me sont apparues singulières : des établissements scolaires qui s'appelaient des maisons et qui n'avaient pas des enseignants mais des moniteurs", écrit le philosophe Bruno Roche dans sa contribution au fort volume publié à l'occasion du 80ème anniversaire de ce mouvement. Ce mot "maison" signifie, ajoute-t-il, "qu'il n'y a pas d'éducation, de transmission, d'éveil de soi et de l'autre (...) que dans un lieu où se côtoient des jeunes et des adultes, où ils se partagent assez de choses pour se sentir liés par une même aventure" tandis que le terme de moniteur évoque un monde où "chacun prend sa part au geste par lequel on éveille un jeune à la reconnaissance de ses propres talents".
Ces thèmes se retrouvent, sous des formes diverses, dans plusieurs des textes ainsi réunis. Philippe Meirieu (pédagogue) souligne que les transmissions ne peuvent se faire que "sur un fonds commun", "dans un univers ayant un minimum de fermeté" : "notre objectif doit être, non pas de transmettre un monde commun mais de le rendre commun dans l'acte même de sa transmission." Pour Pascal Bouchard (journaliste), ces maisons sont "le lieu de construction d'une génération" qui peut ainsi "se décoller, sans les renier pour autant, des valeurs familiales", et pour Xavier Marchand (CNAM), "ce système éducatif confère au jeune le pouvoir de penser par lui-même (...) et de s'imputer la responsabilité de ce qu'il dit et fait", ce n'est pas "qu'une école".
Dès lors, s'inquiète Jean-Claude Daigney (ancien directeur de l'union des MFR), ces maisons ont besoin d'être prises en compte par les pouvoirs publics qui doivent encourager l'initiative locale... "sans pour autant l'étouffer ou la dénaturer", les MFR risquent d'ailleurs d'être enfermées dans leur marginalité... à moins qu'elles ne courent le risque "de la conformité". Henri Nallet (ancien ministre de l'agriculture) rappelle que l'enseignement par alternance a longtemps été considéré comme "un enseignement au rabais". Ce n'est plus le cas et comme l'écrit Cédric Czabo (maires ruraux de France), "il n'y a pas de MFR dans toutes les communes, mais toutes les communes savent identifier la MFR associée à leur périmètre". Ou, comme l'écrit François Rochebloine (ancien député) : "les MFR croulent sous les fleurs, mais pas sous les finances !"
Les MFR fêtent leur anniversaire à La Rochelle. Le volume "Regards sur le monde d'aujourd'hui ... et sur les MFR en particulier", 182 pages, 15€.