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Enseignement privé hors contrat à l'international : un marché émergent en France (Excellencia)

Paru dans Scolaire, Orientation le jeudi 06 juillet 2017.

L'enseignement privé hors contrat connaît un nouveau développement, avec un grand nombre d'ouvertures (sans qu'on sache combien d'établissements ferment), la diversification des sources d'inspiration, et des modèles économiques nouveaux. ToutEduc vous proposera dans les mois à venir plusieurs regards sur ce phénomène, en commençant par un entretien avec Manuella Oster, directrice de l'école Excellencia, à Troissy (Marne) qui va faire sa 4ème rentrée.

ToutEduc : Pourquoi créer une école, et pourquoi à Troissy ?

Manuella Oster : Le groupe GEFOR a été créé en 1991 par Lassaad Kheder. Il s’agit d’un organisme de formation, notamment pour les métiers du tertiaire et BTP. Depuis une dizaine d'années, nous avons développé des formations diplômantes qui permettent à des adultes de passer le bac, ou un BTS. Nous avons acquis un savoir-faire que nous voulions proposer à des jeunes dans le cadre d'une complémentarité de nos activités. Nous souhaitions aussi légitimer notre offre diplômante. D'autre part, nous proposions depuis 1993 des séjours linguistiques à des jeunes étrangers, dans ce château de Troissy. Pour ma part, je suis spécialisée en enseignement du français langue étrangère (FLE). Nous avions donc à notre disposition de magnifiques locaux, mais pour une activité saisonnière.

ToutEduc : Quel est votre modèle pédagogique ?

Manuella Oster : Nous ne nous inscrivons pas dans un courant alternatif. Nous préparons nos élèves au brevet, puisque nous commençons au niveau 4ème, et aux trois séries du baccalauréat général. Nous proposons également le baccalauréat "Sciences et Technologies du Design et des Arts Appliqués" (STD2A). Nous nous référons aux programmes de l'Education nationale, et nous demanderons à passer sous contrat dès que nous aurons 5 ans d'existence. Mais nous avons développé des outils de pédagogie différenciée et nous sommes particulièrement attachés à l'idée de bienveillance.

ToutEduc : Comme tout le monde ou presque ?

Manuella Oster : Non. Nous travaillons avec des effectifs très réduits : nos classes ne comptent pas plus de 12 élèves, et souvent beaucoup moins. Pour répondre aux besoins de chaque élève, les enseignants ont dans leur emploi du temps des moments dédiés chaque semaine pour une écoute active et des entretiens approfondis. De plus, une psycho-pédagogue travaille sur les questions de méthodologie appliquée à chacun. Egalement, en début d’année nous utilisons un test d'identification du profil de l'apprenant.

ToutEduc : D'où vient ce test ?

Manuella Oster : De l'UBC, l'université de Vancouver. Nous n'avons pas trouvé d'outil semblable en France, c’est pourquoi nous sommes allés le chercher au Canada. De même que notre modèle pédagogique est largement inspiré des établissements anglo-saxons, qui misent avant tout sur l'épanouissement global de chacun et la valorisation de toutes les compétences et talents. Nos élèves pratiquent quotidiennement de nombreuses activités extra-scolaires et qui font partie intégrante des apprentissages : des activités sportives (équitation, natation, golf, escrime, tir à l'arc, boxe, judo, football, ...), artistiques et culturelles, allant d’ateliers de conception design et impression en 3D, de conception d'un jeu vidéo à la réalisation de courts métrages. Nos élèves s'engagent et s'investissent également sur des projets transversaux et de responsabilisation tels que la gestion d'une ferme et d'un jardin pédagogiques au sein de l’établissement, ainsi que des activités de bénévolat et actions caritatives et humanitaires.

ToutEduc : Qui sont vos enseignants ?

Manuella Oster : Nos 19 enseignants sont, pour la plupart, des professeurs de l'Education nationale, en disponibilité, ou faisant chez nous des heures complémentaires, ou d'anciens contractuels. Ils sont pour la plupart de Reims, Epernay et les alentours...

ToutEduc : Quel est le montant des droits pour les familles ?

Manuella Oster : 17 à 19 000 €/an pour une pension complète 5 jours par semaine, 21 à 23 000 € pour l’internat permanent 7 jours sur 7, ce qui est très inférieur aux prix pratiqués par certains établissements privés qui accueillent eux aussi en internat permanent des élèves et qui sont d'ailleurs sous-contrat [voir ToutEduc ici et ici]. Ce sont des coûts de scolarité dans la moyenne basse sur le marché international. Nous avions 29 élèves la première année, nous en aurons 62 cette année, notre point d'équilibre est à 70 et nous espérons à terme atteindre une centaine d’élèves.

ToutEduc : D'où viennent-ils ?

Manuella Oster : Environ 40 % d’entre eux sont français. S'y ajoutent des Français nés à l'étranger, qui parlent parfaitement français mais qui ne connaissent pas la culture française. Les autres viennent des pays du Maghreb, d'Afrique sub-saharienne, d'Italie, d'Allemagne, de Grèce, d'Espagne, de Chine (Hong-Kong, Pékin, Wuhan, Canton, Shanghai), du Japon, de Russie, du Kazakhstan, du Canada, des USA, du Brésil, du Chili, des Emirats, de Dubaï, du Qatar, de Turquie, de Libye, et nous avons pour eux un programme spécifique en FLE.

ToutEduc : Comment persuade-t-on des Chinois de venir à Troissy, un bourg sur la route des vins de Champagne ?

Manuella Oster : Nous avions parmi notre clientèle des séjours linguistiques des enfants d'ambassadeurs, d'émirs, de présidents. Nous avons donc pu nous faire connaître auprès de ce public dans un premier temps. Il s’agit au départ d’un investissement conséquent. J'ai pour ma part, en 2013, promu notre établissement à l'étranger, par de nombreuses actions et déplacements avec le soutien notamment d'UbiFrance : les consulats et les postes économiques à l'étranger organisent, moyennant finances, des rencontres avec les acteurs locaux, les établissements français à l'étranger, les ministères, les parents, des agents d'éducation...

ToutEduc : Qu'entendez-vous par "agences d'éducation" ?

Manuella Oster : Ce sont des agences spécialisées qui servent d’intermédiaire entre les familles et l'établissement, moyennant une commission. Toutes sont venues à Troissy pour nous rencontrer et visiter notre établissement, et nous avons de notre côté expertisé leur process de sélection des établissements qu'elles recommandent et des élèves qu'elles nous proposent, combien d'entretiens, comment sont établis les dossiers, quelles questions elles posent sur leurs parcours scolaires, sur le comportement de l'élève, ...

ToutEduc : Vous jouez à l'international le rôle de nos "boîtes à bac" ?

Manuella Oster : Pas du tout. Nous n'acceptons les élèves qu'après avoir examiné leur dossier, reçu leur lettre de motivation, des lettres de recommandation du chef d'établissement, une évaluation de leur capacité à vivre en internat, et un entretien.

ToutEduc : Le salon de l'éducation est-il adapté à vos besoins ?

Manuella Oster : Pas le salon français, qui présente une offre pour l'enseignement supérieur uniquement et pas pour l'enseignement secondaire. Ce sont les salons organisés par des organismes internationaux, ICEF et WEBA, qui sont incontournables, à Berlin, Moscou, Pékin, Sao Paulo, Dubaï.

ToutEduc : Vous dites qu'après l'enseignement supérieur, c'est l'enseignement secondaire qui fait l'objet d'une offre internationale ?

Manuella Oster : Oui, depuis 4-5 ans essentiellement. A côté des poursuites d'études dans le supérieur, ou des années de césure après le bac avec des petits boulots, le marché était limité jusqu'à présent à des séjours linguistiques, durant lesquels les enfants allaient passer une année dans un établissement scolaire à l'étranger, mais seulement pour apprendre la langue. Là, il s'agit vraiment de faire une partie de leur scolarité dans un autre système scolaire, pour les années lycées et même maintenant au niveau collège.

ToutEduc : Quels sont les autres établissements français qui accueillent cette clientèle ?

Manuella Oster : L'Ecole des Roches à Verneuil sur Avre, Tersac à Meilhan sur Garonne, près de Bordeaux, IBS à Aix-en-Provence et Bois-Robert à Angers.

ToutEduc : Et y a-t-il une demande française pour l'étranger ?

Manuella Oster : Oui, nous avons d'ailleurs envoyé l'un de nos élèves passer un an dans une école anglaise. Cependant, nous n'avons pas trouvé en France d'équivalent de ces "agences d'éducation". Nous avons dû passer par une agence britannique.

Propos recueillis par P. Bouchard et relus par M. Oster

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