Que peut un professeur de biologie face au fanatisme religieux ? (film)
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture, Justice le mardi 29 novembre 2016.
Que faire quand on est professeur de biologie et qu’un de ses élèves est en proie à une violente crise de mysticisme religieux ? Ne surtout pas aller voir "Le disciple", le nouveau film de Kirill Serebrennikov ! L’histoire se passe en Russie. Veniamine est un lycéen qui ne veut plus aller à la piscine parce qu’il ne supporte plus les filles en bikini, qui accuse sa mère d’avoir pêché parce qu’elle a divorcé, qui méprise les homosexuels "dépravés", ses profs qui l’ont trahi, le pope jugé trop timoré. Un lycéen qui récite la bible haut et fort à tout moment et particulièrement pendant le cours de biologie… L’éducation sexuelle et la théorie de l’évolution le mettent dans des rages incontrôlées.
Que fait la professeure de biologie ? Au début, elle l’écoute, tente de le comprendre, cherche à le calmer. Mais, malheureusement, elle est la seule. Parce que le drame vient tout autant de lui que de son entourage. Ses camarades de classe se moquent de lui, les profs le menacent de punitions, la proviseure ne sait plus quoi faire et ne fait rien. Conseils de classe, de discipline, rien n’y fait ! Alors, la prof de bio, au détriment de son couple, se met à lire la bible jour et nuit, elle aussi, pour y trouver des citations contraires à celles de Veniamine. Peine perdue, l’agressivité du jeune lycéen redouble !
Un réalisme terrifiant
Dans son combat, la prof a de moins en moins de soutien, pire c’est elle qu’on accuse. Elle exagère, elle est trop moderne, on ne doit pas montrer des préservatifs en classe, et puis, la théorie de Darwin est-elle si vrai que ça ? et puis, n’est-elle pas d’origine juive ce qui expliquerait son animosité envers ce jeune chrétien ? Certes, on est en Russie et tous les travers de la société russe d’aujourd’hui accompagnent cette terrible histoire mais on ressent très vite qu’on pourrait être n’importe où, là où le fanatisme s’attaque à la raison et peut même gagner.
Impossible de décrire les scènes outrancières, la folie qui s’empare des protagonistes, l’intelligence avec laquelle le jeune héros manipule tout le monde et surtout ceux qui s’attachent à lui, le tout filmé avec une justesse et un réalisme terrifiant. Un film remarquable donc, que les professeurs de SVT et tous ceux qui s’intéressent à l’éducation doivent aller voir. Même si, un terrible sentiment d’impuissance peut les saisir en sortant du cinéma.
Colette Pâris