L'accompagnement permet-il le développement des compétences sociales, et l'amélioration des résultats scolaires ? (thèse)
Paru dans Scolaire, Périscolaire le samedi 15 octobre 2016.
Le "socle commun" comprend des savoirs disciplinaires et des "compétences relevant de la socialisation, visant le développement de l’autonomie des élèves ainsi que le vivre-ensemble", relève dans sa thèse en sciences de l'éducation Agathe Fanchini. Mais elle précise que "la définition des compétences sociales ne remporte pas de consensus parmi les chercheurs et les acteurs du système éducatif (...) Si la première difficulté rencontrée découle du manque de consensus autour de la définition du concept, l’évaluation (...) des compétences sociales est d’autant plus complexe."
A cette question s'en ajoute une autre : "quelques travaux de recherche tendent à démontrer l’effet exercé par les dimensions 'non-cognitives' sur les tâches scolaires, les situations d’apprentissage et a fortiori la réussite scolaire (...) Les compétences sociales peuvent être considérées à la fois comme des facteurs de production et le résultat des mécanismes d’apprentissage à l’école".
Lister les compétences
L'OCDE distingue "les compétences cognitives" et les compétences "sociales et émotionnelles". L'auteure pour sa part liste les compétences qui sont susceptibles d'influer sur les résultats scolaires : Sociabilité, Altruisme, Leadership, Ecoute, Politesse, Empathie, Communication, Capacité de résolution de conflit, Coopération, Participation, Adaptation, mais aussi d'autres, davantage scolaires, Application, Persévérance, Autodiscipline, Attention , Autonomie, Curiosité, Dynamisme, Gratification différée, Intérêt. Elle y ajoute le "plaisir d’aller à l’école", la "confiance et le respect envers les enseignants", la "confiance en soi", ou, à en quelque sort à l'inverse, la timidité, l'anxiété, la tristesse.
Pour elle, "l'estime de soi" n'est pas "une compétence sociale en tant que telle". Elle apparaît comme "un socle nécessaire au développement des compétences". En fonction de sa tonalité, "positive ou négative", elle va permettre à l’individu "d’entrer en situation d’apprentissage ou au contraire le freiner".
Toujours est-il que "les compétences sociales semblent jouer directement et indirectement sur la réussite des élèves" : "à caractéristiques sociales égales, le poids des compétences sociales reste significatif dans l’explication des performances scolaires." Certains chercheurs ont d'ailleurs montré que "la performance réalisée lors d’un test cognitif ne dépend pas uniquement des capacités cognitives de l’individu mais également (...) de la volonté à procurer un effort mental supplémentaire afin de résoudre des problèmes (...) Il existe un rôle important de la motivation et d’un comportement optimiste et positif pour la réussite."
Une forme d'affirmation de soi
Dès lors, l'accompagnement scolaire est-il susceptible d'améliorer les compétences cognitives, mais aussi sociales et émotionnelles des élèves ? Jusqu'à présent, la plupart des évaluations de dispositifs d’accompagnement scolaire n'ont pas fait la preuve d'une amélioration significative des résultats scolaires même s'ils relèvent une amélioration des comportements des élèves. Agathe Fanchini s'est plus particulièrement penchée sur un dispositif mis en place par les PEP (Pupilles de l’École publique) à Dijon auprès d'élèves de CE2, CM1 et CM2. Ceux qui bénéficient du dispositif "présentent des niveaux inférieurs de compétences sociales et comportementales en début d’année, notamment pour la persévérance, la gratification différée, l’esprit d’initiative, la conscience scolaire, la confiance en soi et la tristesse". En fin d'année, "même s’il ne permet pas une progression des résultats scolaires, un accompagnement de l’élève permet une forme d’affirmation de soi". Mais elle note surtout que "l’accompagnement scolaire paraît se conformer en un sens aux attentes de compétitivité et d’individualisation de l’institution scolaire tout en n’encourageant pas l’ouverture aux autres et sur le monde". Il est vrai que celle-ci n'est pas, actuellement, valorisée par l'école, malgré l'accent qui est mis, dans la loi d'orientation et le socle commun, sur ce type de compétences.
L'auteure considère néanmoins que les compétences sociales "sont évolutives et peuvent être éduquées", ce qui ouvre "des perspectives pédagogiques et politiques de réduction de l’échec scolaire", mais aussi à une réflexion sur le projet éducatif de l’école et des dispositifs d'accompagnement ; elle reprend à son compte la formule de Marie Duru-Bellat pour qui notre système scolaire pourrait "envisager de former les élèves aux compétences sociales pour les préparer au monde qui les attend […], mais pas seulement le monde du travail."
"Les compétences sociales et la réussite scolaire des élèves de cycle III, l'effet de l'accompagnement scolaire", sous la direction de Sophie Morlaix, thèse soutenue à Dijon le 1er juillet 2016. Un résumé sur le site de l'IFE ici, elle est téléchargeable ici