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"L'autonomie, ça se prend pas à pas" (Eric Hans, SNCEEL)

Paru dans Scolaire le mercredi 05 octobre 2016.

L'autonomie, ça ne se demande pas, "ça se prend pas à pas, et vous choisirez la taille de vos pas." C'est avec cette formule qu'Eric Hans, président du SNCEEL a conclu le débat que le syndicat des chefs d'établissement de l'enseignement libre organisait hier 5 octobre, avec Pierre Marsollier, délégué général du SGEC (le secrétariat général de l'enseignement catholique) et Bernard Toulemonde, ancien recteur, ancien directeur au ministère, juriste et fin connaisseur de l'enseignement privé. Ce dernier se situe d'ailleurs dans une perspective à 20 ans qui verra, pense-t-il, l'Education nationale régionalisée, "l'école du socle" et celle du "bac-3/bac+3"  mises en place, tandis que la logique curriculaire aura eu raison des programmes. Il publiera d'ailleurs (avec la journaliste Soazic Le Névé) au mois de janvier "Et si on tuait le mammouth".

Mais déjà existent "des marges de manoeuvre", puisque "tout ce qui n'est pas interdit est autorisé", que les TPE, l'ECJS, l'accompagnement personnalisé constituent autant "d'interstices" à utiliser. Dans l'académie de Strasbourg, des chefs d'établissements publics reçoivent les enseignants avant leur nomination, avec l'accord du recteur qui les autorise donc à "profiler" les postes. Ailleurs, des chefs d'établissement reçoivent une fois par an chacun des enseignants pour un entretien qui a tout du bilan professionnel. "Ce n'est pas interdit, et c'est avec des initiatives de ce type qu'on fait avancer les choses."

"Nous sommes obligés à la liberté"

Car pour Bernard Toulemonde, les établissements sont confrontés à "des forces assimilatrices intenses", à des règles qui s'appliquent sans tenir compte des spécificités. S'agissant de l'enseignement privé, le contrat qui les lie à l'Etat est du même type que celui que passe avec la SNCF l'usager quand il achète un billet de train, absolument pas personnalisé. Il propose donc aux quelque 70 chefs d'établissement réunis "d'essayer d'avoir de vrais contrats", prenant en compte leur projet et la réalité de la "communauté éducative". Pour Pierre Marsollier, c'est d'ailleurs la nature du contrat qui doit être interrogée. Une personne morale privée participe à une mission de service public, mais elle conserve son caractère privé : "l'Etat est neutre, nous n'y sommes pas obligés. La tutelle qu'il exerce n'est pas un contrôle hiérarchique, elle doit être limitée aux cas prévus par la loi." Pour lui, l'autorité académique ne saurait donner au privé des "instructions", un terme administratif pour "injonctions". La salle fait pourtant part de son exaspération, dans certaines académies, en fonction "de la personnalité du recteur", c'est "de pire en pire", avec des formules du type "vous ferez...".

Mais pour le délégué général, la liberté de l'enseignement privé n'est pas un droit, c'est "une obligation" puisque la caractère propre est inscrit dans le contrat: "nous sommes obligés à la liberté", les établissements doivent "au système éducatif français d'avoir un projet éducatif spécifique", "un caractère propre". Bernard Toulemonde ajoute que "les autorités académiques ne doivent intervenir qu'a posteriori, lorsque les bornes de l'insupportable sont franchies". Il ajoute que la liberté suppose l'évaluation, y compris l'auto-évaluation. Et si les deux orateurs sont d'ardents défenseurs de l'affirmation de l'autonomie des établissements, ils conseillent à la salle "la méthode des petits pas".

Une administration qui ne les connaît pas

Pierre Marsollier invite d'ailleurs les chefs d'établissement à ne pas surinterpréter l'attitude de l'administration qui "ne nous veut pas de mal mais nous connaît mal". Au ministère, précise Bernard Toulemonde, c'est un bureau de la DAF (les affaires financières) qui gère l'enseignement privé, lequel "n'est vu que par le biais des gros sous", et dans les rectorats, leur interlocuteur est une division de la gestion des personnels. De plus, la création récente des BOPA (budgets opérationnels de programme académique) a conféré aux rectorats une responsabilité nouvelle, d'où, actuellement, "un temps de crispation".

Le délégué du secrétariat général évoque aussi des dialogues surprenants. Pour la préparation de la rentrée 2016, l'enseignement privé avait prévu une utilisation "ambitieuse" de ses moyens pour augmenter le taux de mixité sociale dans ses établissements. "La copie a été retoquée, plusieurs rectorats ont trouvé que nous faisions trop de mixité, qu'il fallait que nous recevions davantage d'élèves pour soulager les établissements publics qui devaient faire face à la démographie." Alors que la salle fait valoir une distorsion de coût, puisqu'elle calcule que l'accueil de 17% des élèves représente pour l'Etat 10,3 % du budget, Pierre Marsollier invite à la prudence, et à ne pas remettre en cause le principe non écrit de la répartition des moyens 80-20 (20 % des postes créés vont au privé), "un principe qui nous a protégés" quand la politique était à la suppression de postes, fait-il valoir.

De même, c'est pour "ne pas rentrer dans le dispositif de carte scolaire" et ne pas être "soumis à des algorithmes" que l'enseignement privé ne demande pas à bénéficier pour ses établissements qui reçoivent des publics en difficulté des avantages de leurs homologues du public en éducation prioritaire. "La liberté a un coût." Il n'en réfléchit pas moins à un autre dispositif qui permettrait de faire reconnaître les besoins de l'établissement en termes de mixité sociale sans que cela soit nécessairement lié à son implantation géographique.

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