Archives » Actualité

ToutEduc met à la disposition de tous les internautes certains articles récents, les tribunes, et tous les articles publiés depuis plus d'un an...

France-Stratégie : la Nation doit définir la finalité de l'Ecole

Paru dans Scolaire, Orientation le jeudi 22 septembre 2016.

"Les attentes démesurées de la société française vis-à-vis de son Ecole contribuent aujourd'hui à ses difficultés autant qu'à son inertie", estime dans son rapport un groupe de travail mis en oeuvre par France Stratégie sur le thème "quelle finalité pour quelle école ?" La conclusion s'impose, cette question "n'a aucune réponse univoque" et "le choix à faire est éminemment politique" puisqu'il s'agit de "définir collectivement le rôle que nous voulons voir l'Ecole jouer dans notre société".

Comme l'explique Jean Pisani-Ferry, ce rapport ne ressemble pas à ceux que produit habituellement l'organisme, où un ensemble de données permettent de faire des préconisations. Le Commissaire général souligne la nécessité de "faire un pas de côté", d' "ouvrir le débat" alors que le code de l'éducation dans son article L.111.1 (correspondant au 1er article de la loi d'orientation) "illustre cette juxtaposition de priorités, toutes valables en elles-mêmes, certes, mais non hiérarchisées et insuffisamment articulées entre elles". Et Son Thierry Ly, le rapporteur, ajoute qu'un test comme PISA définit implicitement des finalités et des objectifs aux systèmes éducatifs.

La méritocratie

Mais notre système scolaire a déjà la sienne, "malgré tous les efforts pour en sortir" : assurer la distribution des positions sociales de façon qu'elle soit acceptable par tous. L'enjeu est tel que "l'Ecole ne peut que devenir un lieu de compétition féroce", et comme elle n'est pas en mesure "d'effacer les déterminismes sociaux qui pèsent sur la réussite scolaire", elle "fait le choix de l'uniformité de l'offre", ce que le rapport qualifie de "pis-aller" pour légitimer son fonctionnement méritocratique. Pour les enseignants, cela suppose de garder une certaine "distance aux élèves", un "rapport impersonnel".

Le groupe de travail s'est alors livré à un exercice de comparaison des utopies. Quelle devrait être l'organisation de notre système scolaire si on lui attribue une autre finalité ? Il examine, "en poussant jusqu'au bout la logique", trois hypothèses. Si on estime que l'Ecole doit "préparer au monde professionnel" et "fournir à la société les compétences dont elle a besoin", "le cursus national devrait être décliné au niveau territorial afin de s'adapter au tissu socioéconomique local", les établissements devraient nouer des liens très forts avec les "structures d'emploi local", les enseignants devraient être capables "de concevoir et de gérer des partenariats multiples"; des "experts-formateurs" interviendraient fréquemment, les élèves multiplieraient les stages et les "séquences d'activités productives, organisées sur des sites professionnels", mais ils ne se spécialiseraient que progressivement.

L'accomplissement de soi

Autre utopie, l'Ecole a pour première finalité "l'accomplissement de la personnalité de chaque élève", ce qui suppose l'absence de programme national, de façon à partir des spécificités et des besoins de chacun. Les enseignants ont un rôle de transmission, mais aussi de tuteurs, pour aider l'élève à définir son parcours et pour lui fixer à chaque fois "un niveau élevé d'exigences".

Troisième possibilité, l'Ecole "se donne pour but la transmission d'une 'culture commune' (...) à tous les élèves (...) Ce modèle semble être celui qui se rapproche le plus du système scolaire existant, mais débarrassé de la finalité méritocratique de sélection des élites", ce qui suppose de "pousser la logique du socle jusqu'au bout". De plus, les "savoirs" (dans le sens le plus général du terme) ne servant plus de fondement à la sélection des élites, "ils doivent se justifier par eux-mêmes", y compris lorsqu'ils sont "très éloignés du monde de certains élèves". Il faudrait donc consentir "des efforts énormes pour amener chaque élève à les acquérir".

Articuler les modèles 

Evidemment, aucun de ces modèles ne s'impose à l'exclusion des autres et ces diverses finalités peuvent être portées à des moments différents de la scolarité. L'Ecole a un rôle à jouer pour justifier la distribution des places, pour préparer les générations qui viennent au monde professionnel, elle contribue à l'épanouissement individuel et à la construction d'une société où chacun aura un minimum de savoirs communs dont la définition est "un objet politique au sens noble du terme". Et si France Stratégie estime que le débat, ainsi clarifié, doit être porté devant la société, elle reconnaît la difficulté de son organisation démocratique.

Le rapport note toutefois la contradiction entre le modèle méritocratique et les trois autres. Le premier implique une manière d'enseigner "uniforme" tandis que les modèles alternatifs supposent que les équipes pédagogiques soient "appelées à mettre en place les actions nécessaires selon leur public pour assurer au mieux" leur succès. Le rapport ne se prononce pas sur la gestion de ces équipes ni sur le rôle que pourrait jouer le chef d'établissement.

Les experts sont: Anthony Cabrera, Didier Dacunha-Castelle, Mara Goyet, Yannick Loiseau, Marie Poissonnier, Serge Pouts-Lajus, Erwan Rivaollon, Vincent Troger

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →