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Mineurs isolés étrangers : plusieurs décisions du Conseil d'Etat, de tonalités différentes

Paru dans Justice le mercredi 17 août 2016.

Le Conseil d'Etat a pris, fin juillet, plusieurs décisions concernant des mineurs isolés étrangers, qui mettent en évidence le caractère décisif de la mesure de justice relative au statut de ces jeunes, même si elle se fonde sur des tests osseux, dont la validité est pourtant mise en cause par la loi. Deux d'entre elles sont inscrites au "recueil Lebon" ce qui signifie que la Haute juridiction les considère comme importantes.

Le 28 juillet, il rejette la requête d'un ressortissant bangladais arrivé à Tarbes au mois de février. Il est, dans un premier temps, pris en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance en qualité de mineur étranger isolé. Une expertise osseuse conclut à sa majorité et sa prise en charge est interrompue. Il saisit le juge des enfants, mais le parquet considère, au vu de la radiographie qu'il n'entre pas dans le dispositif des mineurs non accompagnés.

Le Conseil d'Etat considère que, "lorsqu'il est saisi par un mineur d'une demande d'admission à l'aide sociale à l'enfance, le président du conseil départemental peut (...) décider de saisir l'autorité judiciaire mais ne peut, en aucun cas, décider d'admettre le mineur à l'aide sociale à l'enfance sans que l'autorité judiciaire l'ait ordonné". Or, dans le cas présent, "compte tenu de la décision du procureur de la République selon laquelle M. A... n'entrait pas dans le champ des mesures prévues pour les mineurs isolés, et en l'absence d'autre décision de l'autorité judiciaire, la suspension de la prise en charge de l'intéressé par le département des Hautes-Pyrénées ne révèle (...) aucune atteinte grave et manifestement illégale au droit à l'hébergement et à la prise en charge éducative d'un enfant mineur". Et la Haute juridiction prend soin d'ajouter : "quelles que soient les conditions dans lesquelles l'expertise osseuse à laquelle M. A...a été soumis a été pratiquée".

La décision n° 401626 (inscrite au recueil Lebon) du jeudi 28 juillet 2016 ici

La veille, le Conseil d'Etat avait en revanche pris une série de décisions favorables à quatre mineurs isolés, reconnus comme tels par le juge des enfants qui les avait confiés à l'aide sociale à l'enfance. Ils vivent pourtant "dans des conditions très précaires, dans le jardin des Olieux, situé dans le quartier des Moulins à Lille"; ils demandent au conseil départemental du Nord de leur assurer une alimentation quotidienne correspondant à leurs besoins, ils demandent à la mairie et au préfet de mettre à leur disposition "deux conteneurs qui seront vidés régulièrement, afin qu'ils puissent y déposer leurs déchets, ainsi que des toilettes chimiques", et la création de trois points d'eau.

La Haute juridiction considère "qu'il incombe au juge des référés d'apprécier, "en tenant compte des moyens dont l'administration départementale dispose ainsi que de la situation du mineur intéressé, quelles sont les mesures qui peuvent être utilement ordonnées". Celles-ci peuvent "revêtir toutes modalités provisoires". Ces mesures peuvent incomber "aux autorités titulaires du pouvoir de police générale" mais elles ne sauraient avoir pour effet "de dispenser le département de ses obligations en matière de prise en charge des mineurs confiés au service de l'aide sociale à l'enfance" et le juge des référés ne peut "prononcer une injonction à leur égard que dans l'hypothèse où les mesures de sauvegarde à prendre excéderaient les capacités d'action du département".

Celui-ci fait valoir les efforts qu'il a déjà entrepris pour "la mise à l'abri et l'accueil de mineurs isolés étrangers", mais, faute de solution d'hébergement, ces jeunes avaient trouvé refuge dans ce jardin "où vivent plusieurs dizaines de mineurs isolés étrangers, sous des tentes mises à leur disposition par une association, sans accès à l'eau potable". Or il ne résulte pas de l'instruction "qu'aucune solution ne pourrait être trouvée pour (les) mettre à l'abri" et assurer leurs besoins quotidiens "dans l'attente d'une prise en charge plus durable". Le juge des référés pouvait donc enjoindre au Département de leur proposer "dans un délai de trois jours, une solution d'hébergement incluant le logement et la prise en charge de (leurs) besoins alimentaires quotidiens".

A noter que la Haute juridiction souligne que "l'abstention du département du Nord à prendre en compte les besoins élémentaires de (ces mineurs) en ce qui concerne l'hébergement, l'alimentation, l'accès à l'eau potable et à l'hygiène, malgré (leur) placement à l'aide sociale à l'enfance et l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille, fait apparaître une carence caractérisée, qui est de nature à (les) exposer à des traitements inhumains ou dégradants".

Les décisions du 27 juillet n° 400055 (inscrite au recueil Lebon) ici, 400056 ici, 400057 ici, 400058 ici,

 

 

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