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Scolarisation des mineurs isolés étrangers et hébergement des familles avec enfants : 5 décisions de justice (TA et Conseil d'Etat)

Paru dans Petite enfance, Scolaire, Périscolaire, Justice le samedi 16 juillet 2016.

"Il est enjoint au président du conseil départemental de la Vienne de procéder" pour la prochaine rentrée à l'inscription dans un établissement scolaire de trois mineurs isolés étrangers, âgés de 16 et 17 ans. Ceux-ci se sont adressés en référé au tribunal administratif de Poitiers, se plaignant d'être laissés "à l'abandon dans un hôtel, isolé(s) et déprimé(s)", ce qui a des "conséquences graves" sur leur état de santé psychique.

Le TA considère que "le juge peut assortir la remise d'un enfant à un service départemental d'aide sociale de l'obligation de fréquenter un établissement d'éducation ordinaire" et que, si cette décision incombe à un juge judiciaire, le litige qui en découle peut relever du juge administratif. Il ajoute que le département méconnaît l'obligation posée par l'article L.112-4 du code de l'action sociale et des familles en même temps que le jugement du juge des enfants qui avait autorisé, au mois de février de cette année, l'aide sociale à exercer pour ces mineurs "les actes de l'autorité parentale concernant sa santé, son éducation et ses démarches administratives".

Les trois jugements, n° 1601537, 1601535 et 1601536 sont datés du 12 juillet.

Le Conseil d'Etat pour sa part donne tort au département de Seine-Saint-Denis qui a mis fin à la prise en charge des frais d'hébergement d'une femme qui avait été contrainte de quitter le domicile familial à la suite de violences conjugales, "au motif que le dernier enfant de l'intéressée avait eu trois ans et que la collectivité départementale n'avait depuis lors plus compétence pour assurer ce financement".

Il considère qu'un département, "sans préjudice de la faculté qui lui est ouverte de rechercher la responsabilité de l'Etat en cas de carence avérée et prolongée", "ne peut légalement refuser à une famille avec enfants l'octroi ou le maintien d'une aide (...) au seul motif qu'il incombe en principe à l'Etat d'assurer leur hébergement". Certes, "l'intervention du département ne revêt qu'un caractère supplétif, dans l'hypothèse où l'Etat n'aurait pas accompli les diligences qui lui reviennent", mais il doit "procéder à un examen de la situation particulière des familles qui sollicitent une telle aide et s'assurer, avant d'en refuser l'octroi ou d'interrompre son versement, de l'existence d'une solution alternative de nature à éviter que la santé ou la sécurité des enfants soient menacées". L'intervention du département "conserve un caractère supplétif", et elle ne fait pas peser sur la collectivité "des charges qui, par leur ampleur, seraient de nature à entraver leur libre administration"

La décision n° 388317 du mercredi 13 juillet 2016 (ici) est inscrite au recueil Lebon

A noter quatre autres décisions du Conseil d'Etat relatives à l'hébergement de familles déboutées du droit d'asile. Trois fois, il "enjoint au préfet du Puy-de-Dôme d'assurer l'hébergement d'urgence" de familles avec enfants qui demandaient également au département "de financer à leur profit un hébergement de type hôtelier par l'attribution d'une aide financière mensuelle".

La première est un couple russe, d'origine tchétchène, qui "a été hébergé et pris en charge par l'Etat au centre d'accueil pour demandeurs d'asile de Cébazat, dans le Puy-de-Dôme" avec ses enfants âgés de deux ans et de quelques mois. Sa prise en charge a cessé "à la suite du rejet définitif de sa demande d'asile". La Haute juridiction considère "qu'il appartient aux autorités de l'Etat de mettre en oeuvre le droit à l'hébergement d'urgence reconnu par la loi à toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique ou sociale".

Certes "les ressortissants étrangers qui font l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) n'ayant pas vocation à bénéficier du dispositif d'hébergement d'urgence, une carence constitutive d'une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ne saurait être caractérisée (...) qu'en cas de circonstances exceptionnelles", mais c'est le cas "lorsque, notamment du fait de leur très jeune âge, une solution appropriée ne pourrait être trouvée dans leur prise en charge hors de leur milieu de vie habituel par le service de l'aide sociale à l'enfance" : L'intérêt supérieur des enfants "doit être une considération primordiale dans les décisions les concernant". En revanche, la demande des parents portant "seulement sur la fourniture d'un hébergement d'urgence", le Conseil d'Etat ne considère pas que le Département soit fautif. 

Le même raisonnement vaut pour un couple angolais, et pour un couple albanais. Il ne vaut pas en revanche pour un autre couple albanais, qui a "bénéficié, avec (ses) enfants nés en 2005, 2008 et 2012, d'un hébergement pendant la période nécessaire à leur départ après le rejet de leur demande d'asile", mais qui "n'ont pas accepté l'aide au retour qui leur a été proposée" et qui "ne font état d'aucune circonstance exceptionnelle". Quant au département, son intervention "ne revêt qu'un caractère supplétif, dans l'hypothèse où l'Etat n'aurait pas accompli les diligences qui lui reviennent", il n'est donc pas fautif.

Les décisions n° 399829 ici, n° 399836 ici, n° 399834 ici et n° 400074 ici du mercredi 13 juillet 2016

A noter sur le droit d'hébergement le commentaire de J-L Rongé dans le Journal du droit des Jeunes (mars 2016). La protection de l'enfance s'étend aux "mineurs émancipés et majeurs de moins de vingt et un ans" et qu'elle n'est pas conditionnée "par le statut des bénéfi ciaires tenant à la nationalité ou à la régularité du séjour".

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