Les axes des combats à venir pour la Ligue de l'enseignement qui a fêté ses 150 ans
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture, Justice le mardi 28 juin 2016.
A l'issue du congrès de ses 150 ans, la Ligue de l'enseignement a adopté à l'unanimité (moins deux abstentions) une déclaration dans laquelle elle affirme continuer le combat lancé par Jean Macé en 1866 "pour une citoyenneté émancipatrice, une citoyenneté sans préalable, qui ne se limite pas au droit de suffrage, et qui s’exerce au profit de la justice sociale, de la paix et de la liberté".
"L’éducation est notre grande cause", mais, ajoute Eric Favey, vice-président, interrogé par ToutEduc, le champ de l'éducation excède de beaucoup celui de l'Ecole, il s'étend à l'éducation non-scolaire, à l'éducation familiale, à la possibilité de la formation tout au long de la vie. Second champ d'intervention, la démocratie, avec le souci qu'elle soit "de haute activité" et qu'elle articule délégation et délibération.
La laïcité n'est pas l'invisibilité
"La laïcité est notre grand combat", mais, ajoute Eric Favey, si la France est une République "indivisible", les personnes ne sont pas "invisibles" pour autant. La laïcité implique "la neutralité des pouvoirs publics, pas de l'espace public". En arrière-plan, c'est la lutte contre les inégalités qui anime la Ligue, et le vice-président évoque à ce sujet Bertold Brecht pour qui les hommes et les femmes ne peuvent comprendre le monde que s'ils ont le pouvoir de le transformer.
Dans une intervention sur l'histoire de la Ligue, Hélène Grimbelle, secrétaire nationale, rappelle qu'elle est, dès l'origine, marquée par les interrogations : "Quelle est sa légitimité pour intervenir sur les questions d’éducation ?" Mais "une question irrésolue peut être la clé d’une étonnante longévité", ajoute-t-elle. Après avoir obtenu "la généralisation de l’instruction primaire, comme une 1ère fabrique des Républicains", la Ligue "trouve sa place aux côtés de l’institution (scolaire), à la fois comme son 'double' militant et comme un prolongement de son action". Elle "se voit confier le périscolaire". La question de sa légitimité change alors de forme : va-t-elle "se faire nationaliser", ou restera-t-elle "le poisson pilote de l’institution et son espace d’expérimentation" ?
"participer à l'histoire qui vient"
Elle investit les champs du sport (avec l’Usep), des sciences, des arts et du loisir. "La Ligue aurait pu s’installer confortablement dans son rôle de gestionnaire d’activités de loisirs, à bonne distance de l’École", poursuit Hélène Grimbelle avant d'évoquer au contraire "son retour dans le champ de l’École" à partir des années 80, "car les défis de l’École sont aussi les (siens). Ce sont les inégalités et les discriminations qui sapent le projet démocratique et social de la République."
Pour Eric Favey, ce congrès s'inscrit dans un contexte de "montée des périls". L'annonce du "brexit" est d'ailleurs intervenue après qu'une table ronde eut souligné l'importance de la construction européenne pour préserver la paix. Pour lui, la Ligue doit à présent "faire un travail d'explicitation des enjeux" et "renforcer sa base militante", lutter "contre les simplifications et les mensonges" en toutes occasions, "y compris un pot après une rencontre sportive". Mais il a été "un peu scotché" par l'envie de continuer qu'ont manifestée les quelque 1 100 participants, notamment les jeunes en service civique. Ils ont aidé à l'organisation du congrès, mais, à cette occasion, ils "ont découvert l'histoire de la Ligue, et ils ont compris qu'ils participaient à l'histoire qui vient".