Exclusions temporaires : une "routine punitive" centrée sur les élèves les plus jeunes (étude)
Paru dans Scolaire, Justice le mercredi 08 juin 2016.
"L’exclusion temporaire est utilisée comme marqueur d’un cadre disciplinaire explicitement rigide, perçu comme le seul recours aux risques des débordements adolescents", remarque Benjamin Moignard, directeur de l'Observatoire universitaire international éducation et prévention (Université Paris-Est Créteil), dans une étude publiée dans la revue International Journal of Violence and Schools (09/2015, 15).
Le chercheur a mené une enquête auprès de 76 collèges de la région parisienne. Principal constat : "ces exclusions sont massives dans de nombreux établissements". En moyenne, il comptabilise de 2 à 7 élèves exclus par jours et par collège selon les mois. Autre observation : une concentration de ces sanctions chez les adolescents les plus jeunes. "Ce ne sont pas les incidents les plus graves qui sont les plus sanctionnés : ce sont les élèves les plus jeunes qu’il faut recadrer à temps", analyse le chercheur. Un résultat qui contredit d’autres travaux qui évoquent, eux, un recours au régime disciplinaire plus important chez les adolescents plus âgés.
"Une autorité nécessaire qui devient aveugle"
"L’exclusion temporaire devient ainsi une routine punitive, intégrée à des formes de contrôle ordinaire de l’ordre scolaire, et rarement envisagée comme un ultime recours face aux incidents graves qui peuvent se produire", en déduit Benjamin Moignard. Elle représente aussi un moyen privilégié par les équipes de direction pour "manifester leur solidarité face aux difficultés rencontrées par les équipes".
Au final, le chercheur y voit "une dilution des préoccupations liées à l’encadrement éducatif des élèves, au profit de l’affirmation d’une autorité nécessaire qui devient aveugle". L’espace scolaire tend à devenir "un espace comme un autre, où les injonctions éducatives propres à le définir s’effacent au profit d’une recomposition judiciarisée de son organisation et de ses référentiels". À noter cependant, certains établissements se démarquent en sanctionnant "dix à trente fois moins d’élèves que leurs homologues".
L'étude est consultable ici
Diane Galbaud