A quoi sert l'école ? Le sondage de l'APEL avant le congrès des "parents de l'enseignement libre"
Paru dans Scolaire le mardi 31 mai 2016.
Pour la moitié des parents d'élèves, "les valeurs les plus importantes à transmettre" sont le respect, la rigueur, la persévérance, le civisme tandis que la liberté, la fraternité ne sont citées que par 16 et 15 % d'entre eux. Mais ils sont 80 % à penser que l'Ecole enseigne bien la Liberté, et 66 % qu'elle enseigne l'égalité, et ils sont moins d'un sur deux à penser qu'elle enseigne le respect... Cette "dissonnance très forte" est, pour Julien Goarant, l'un des enseignements du sondage OpinionWay - APEL- La Croix révélé ce 31 mai, avant le congrès de l'Association des parents de l'enseignement libre, ce week-end à Marseille.
La présidente, Caroline Saliou et son vice-président Jean-François Hillaire se représentent et devraient être reconduits sans problèmes, mais deux autres binômes briguent la tête de l'association. L'un, formé d'Aymeric Le Clere et Philippe Abadie ne cache pas son hostilité à la réforme du collège, et le caractère politique de sa candidature. Le second, composé de Christophe Simon et de Paul Gaudin s'inquiète du manque de "transparence et de représentativité du mouvement". Caroline Saliou, interrogée par ToutEduc, reconnaît une faiblesse de la communication avec les parents dans les établissements, mais pas avec les niveaux académiques ou départementaux.
L'image de l'Ecole a changé
Toujours est-il que les congressistes devront répondre à la question, "Pourquoi l'école ?" et la présidente propose 5 axes de réflexion, la maîtrise des fondamentaux (qui suppose un repérage des difficultés de langage dès la maternelle), le socle commun (ce qui va avec la reconnaissance des intelligences multiples et l'expression des talents), le lien école - entreprise (qui doit être réciproque), les valeurs (donner l'envie d'apprendre, le goût de l'effort, valoriser la fraternité), l'aide apportée à chaque jeune pour qu'il se construise.
Elle prolonge ainsi les résultats du sondage (qui concerne aussi bien des parents d'élèves du privé que du public, les réponses des uns n'étant pas très différentes de celles des autres). Il montre d'abord que, pour nombre de parents, l'image de l'école a changé. Celle qu'ils ont connue était, pour 63 % d'entre eux, d'abord soucieuse de "transmettre à l'élève les savoirs et connaissances fondamentaux". C'est encore la première mission de l'école, constatent seulement pour 44 % d'entre eux. Ils sont surtout 52 % à penser que l'école n'est pas "bien adaptée aux enfants d'aujourd'hui", d'autant qu'ils sont plus de 60 % à penser qu'Internet change le rôle de l'enseignant et de l'Ecole, et même 19 % à penser qu'il permettrait "de se passer de l'Ecole".
L'individuation plutôt que l'individualisme
Ils ne demandent pourtant pas la disparition de l'Ecole, mais ils sont 9 sur 10 à penser qu'il faut prendre davantage en compte "la personnalité et les talents de l'élève", "améliorer la pédagogie", "mieux prendre en compte le bien-être et le bien-vivre à l'école", mais aussi "s'ouvrir davantage sur le monde socio-professionnel" et "renforcer le lien entre les parents, les élèves et les enseignants". Ils sont même 7 sur 10 à souhaiter pour l'élémentaire des après-midis "à la carte", 6 sur 10 à souhaiter "des établissements sans classes, organisés par niveaux et matières" et 1 sur 2 à souhaiter des emplois du temps "sur mesure en fonction des motivations des élèves".
Pour Julien Goarant, le sondage témoigne d'un "recentrage sur l'épanouissement", et une demande d'individuation, à ne pas confondre avec l'individualisme, souligne Jacqueline Luciani, principale du Sacré-Coeur à Marseille. Cet établissement compte 30 % de boursiers et 30 % d'élèves musulmans. Pour elle comme pour Julien Goarant, la demande sociale ne suffira pas à faire bouger les enseignants, car s'il y a du bonheur à travailler dans un établissement comme le sien, avec une organisation sans classe et des groupes dont les élèves peuvent changer régulièrement, c'est aussi une "l'usine à gaz" qui suppose un fort investissement des personnels.
A noter que l'APEL diffuse un petit livret, "10 bonnes raisons d'aller à l'école".