Congrès de la FSU : la continuité ne doit pas masquer un contexte très particulier
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le jeudi 28 janvier 2016.
Seule candidate à sa succession, Bernadette Groison devrait être réélue sans problème à la tête de la FSU à l'issue du congrès de la "fédération syndicale unitaire", au Mans, du 1er au 5 février. Au secrétariat, seule Eliane Lancette, la trésorière, ne se représente pas. Le nombre des adhérents, "en dents de scie", est globalement stable, quelque 160 000 adhérents contre 163 000 trois ans plus tôt, et les équilibres entre les tendances également stables : Unité et Action perd un point ou deux à 71%, Ecole émancipée gagne deux points et frôle les 20 %, les trois autres tendances recueuillent entre 2,4 et 4 % des suffrages des 34 181 délégués qui se sont exprimés au mois de novembre. Cette "continuité" ne doit pas masquer les évolutions depuis trois ans.
La secrétaire générale présentait ce 28 janvier à la presse les enjeux du congrès, dans "un contexte bien différent" de celui qui prévalait à Poitiers, en 2013. Les militants sont "un peu découragés", "un peu épuisés", il y a "plus d'impatience" et il s'agit pour la fédération d'avoir "une capacité plus grande à intervenir sur le monde du travail" alors que "le mouvement syndical n'est pas actuellement en situation de réagir". Quand Vincent Peillon au début du quinquennat portait un discours éducatif fort, avec lequel la FSU n'était pas toujours d'accord, elle regrettait qu'il ne soit porté que par un seul ministre, mais elle a le sentiment que les changements de ministre ont, depuis, provoqué un amoindrissement du propos. Autre difficulté qu'évoque Bernadette Groison, la montée du Front national parmi les fonctionnaires, y compris les enseignants. "Il faut parler à ces collègues sans tenir un discours sur le bien et le mal, mais en regardant de près le programme de l'extrême droite, et comment ce parti leur ment." La démonstration serait plus aisée, ajoute-t-elle si "nous avions une alternative à leur proposer, si les succès du gouvernement étaient évidents en termes de lutte contre le chômage ou de politique éducative."
Un syndicalisme qui doit évoluer dans un monde qui bouge
Et surtout, si le message du gouvernement n'était pas "brouillé" par certaines déclarations. Certes, B. Groison reconnaît qu'Emmanuel Macron n'a pas proposé l'abandon de toute qualification, "on est capables de faire des nuances", mais la confusion entre les qualifications de branche (les CQP, ndlr) et des diplômes "reconnus par tous" participe d'un abaissement des exigences. D'ailleurs le congrès sera amené à travailler sur la question des sorties sans qualification, mais aussi sur le travail en équipe des enseignants et leur formation.
Même si la table ronde sur le terrorisme qui était prévue n'a pu être organisée, le congrès sera de même amené à s'interroger sur ses origines. "Expliquer n'est pas excuser", et on ne peut combattre un phénomène si "on ne comprend pas d'où il vient", quand les valeurs "ne font plus sens" pour des jeunes qui voient les inégalités se creuser. Les délégués réunis au Mans s'interrogeront aussi sur les évolutions du syndicalisme dans "un monde qui bouge". Les évolutions du monde du travail ne sont pas nécessairement négatives, elles peuvent constituer "une chance". "C'est à nous de trouver les moyens de provoquer des discussions, de construire des propositions pour aller de l'avant".
La souffrance au travail
Mais le premier rendez-vous avec le Gouvernement après le congrès est fixé au mois de février et portera sur les salaires. "Le dégel du point d'indice est une évidence, mais on attend autre chose qu'une mesure symbolique, qu'un 0,00n%, alors que les fonctionnaires ont perdu depuis 2002 l'équivalent de 2 mois de salaire. Nous allons continuer d'appeler toutes les fédérations de fonctionnaires à peser sur les négociations. Si le Gouvernement ne met pas, dès le départ, sur la table, une proposition suffisante, il trouvera la FSU sur son chemin."
La question du bulletin de salaire est en effet très sensible chez des délégués qui, par les amendements qu'ils ont faits aux textes préparatoires ont aussi mis en évidence une réelle souffrance au travail, le sentiment que leurs missions étaient "dénaturées". Il s'agit aussi pour la direction de la FSU de proposer des solutions pour "rendre les professionnels acteurs de leurs métiers".