Enseignant : comment lutter contre l'usure du métier ? (Françoise Lantheaume)
Paru dans Scolaire, Culture le mercredi 27 janvier 2016.
Comment lutter contre la lassitude liée à la routine du métier d'enseignant ? C'est la question posée par Françoise Lantheaume, professeur des universités en sciences de l'éducation à Lyon-II, dans un article paru dans l'ouvrage collectif "Apprendre à enseigner" (PUF), publié en janvier.
Premier constat : "l'entrée plus tardive dans le métier (...) et l'âge sans cesse reculé du départ à la retraite font que les enseignants restent plus longtemps en activité et de plus en plus âgés". Comment font-ils face à l'éventuelle "usure" ressentie ? "Les enseignants complètement sclérosés, restant fixés sur les mêmes pratiques pédagogiques et contenus d'enseignement, ou perpétuellement innovants dans tous les domaines, sont l'exception", remarque la chercheuse.
La reconnaissance du travail, "puissant moteur d'engagement"
En réalité, le désengagement - y compris chez les novices - peut concerner un certain type de tâches pour se concentrer sur d'autres activités, éventuellement les renouveler. Mais cette lutte contre la routine ne serait possible qu'à certaines conditions : une organisation des tâches favorable à la créativité ; la reconnaissance du travail, "puissant moteur de dynamisme et d'engagement", mais "trop absente", y compris de la part des pairs (en raison de la faiblesse des collectifs de travail). Autre condition nécessaire pour rendre le métier "plus vivant" et "nourrir une pensée active" : la formation continue.
Parmi les pistes à explorer, Françoise Lantheaume propose de mettre en avant la notion de "plasticité". Autrement dit, les enseignants peuvent donner une forme nouvelle aux routines "au moyen d'ajustements". Ils peuvent notamment "intégrer de nouveaux gestes (liés au numérique par exemple), des contenus d'enseignement encore inexplorés, des relations de proximité pour individualiser l'enseignement, etc.".
"Réinventer le métier"
Ainsi, "l'usure et l'ennui ne sont pas une fatalité", affirme la chercheuse. Il est possible de "réinventer le métier, pour affirmer et renouveler une identité professionnelle tout au long de la carrière". Elle suggère notamment de faire évoluer la formation continue : à côté de l'appropriation d'outils conceptuels et méthodologiques, celle-ci doit incarner "un lieu de débat sur 'comment faire', de mutualisation des expériences et de réflexion distanciée à leur propos".
"Apprendre à enseigner", sous la direction de Valérie Lussi Borer et Luc Ria, PUF, collection "Apprendre", janvier 2016.
Diane Galbaud