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"Une offensive idéologique qui a visé à ringardiser l’antifascisme, l’antiracisme…". Benjamin Stora (Fenêtres sur cours)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le mardi 08 décembre 2015.

"La pensée dominante, aujourd’hui, vise à évacuer les luttes antiracistes, les luttes anticolonialistes, les luttes antifascistes, toute cette histoire-là est évacuée." C’est le constat de l’historien Benjamin Stora dans un entretien publié dans un numéro spécial de Fenêtres sur cours, le magazine du SNUIPP-FSU. Intitulé "15 ans de débats entre chercheurs et enseignants", ce numéro "veut rendre compte de la richesse" de l’Université d’automne du syndicat qui s’est tenue en octobre dernier à Port Leucate en "y apportant quelques éclairages inédits".

Spécialiste des questions d’immigration, président du Musée de l’histoire de l’immigration, Benjamin Stora attribue la résurgence de la xénophobie en France et ailleurs par la montée du chômage : "Il y a un sentiment d’exacerbation de la concurrence sur le marché du travail et cela provoque de manière incontestable des tensions entre nationaux et non nationaux". Autre raison : "C’est la sensation d’une panne de l’intégration des immigrations antérieures, la sensation qu’il y a encore des problèmes à régler sur ces questions. Alors se produit une sorte de télescopage, de confusion dans les esprits entre les immigrés, les enfants d’immigrés, les réfugiés". 

Des principes affaiblis 

L’historien s’inquiète de "l’affaiblissement des mouvements de solidarité" et précise : "Depuis une trentaine d’années se développe une offensive idéologique qui a visé à ringardiser l’antifascisme, l’antiracisme, tout ce qui était porteur de solidarité et cette offensive a porté." Pour Benjamin Stora, "à travers ces remises en cause, ce sont les principes même de la République qui se trouvent affaiblis. […] On en revient aujourd’hui à expliquer qu’il y a des différences entre les races, une différenciation sur le plan culturel, avec des hypothèses culturalistes assez complexes aboutissant en fin de compte à une forme de hiérarchisation des races, mais sans le dire vraiment. Les mots ne sont plus les mêmes mais les idées sont identiques."

A propos de la part de responsabilité du politique dans ces évolutions, l’historien affirme : "Ce qui est devenu essentiel, ce n’est plus la notion de solidarité collective mais celle de l’individu. […] Alors que pendant des décennies l’idéologie dominante a été d’aller vers plus de bien commun, vers plus de solidarité effective, aujourd’hui ce qui domine ce n’est plus du tout ça. C’est le culte de l’individu, du profit immédiat…".

Pour relever le défi de l’intégration, Benjamin Stora pense qu’il y a "besoin d’un effort supplémentaire de l’Etat mais aussi des intellectuels, des universitaires. […] Il y a une trop grosse coupure dans notre société et pas simplement avec les politiques. Des universitaires, des intellectuels, il y en a des bataillons dans ce pays, des milliers de personnes qui savent des milliards de choses mais qui ne partagent pas beaucoup leur savoir avec ceux qui vivent sur ces territoires de banlieue."

Déconstruire des mythes

Parmi toute une série d’articles et d’entretiens sur l’état de l’école, les apprentissages, l’éducation prioritaire, les métiers, la maternelle, l’enfant et la société, le sport et la santé, André Tricot, professeur de psychologie à l’Espé de Toulouse, cherche à "déconstruire des mythes" à propos du rôle du numérique à l’école. "Le numérique est un outil extraordinaire", souligne-t-il. "On a une chance inouïe d’assister à cette révolution dont l’importance est du niveau de celle de l’invention de l’imprimerie ou de l’écriture mais ce n’est qu’un outil, un support".

Parmi les mythes, André Tricot réfute une affirmation fréquemment répandue : "Les enfants d’aujourd’hui sont digital natives, nés avec l’ordinateur, et seraient naturellement doués en informatique contrairement aux digital immigrants, nous, qui l’avons découverte à l’âge adulte et serions moins à l’aise. En fait, il n’y a aucune donnée empirique en ce sens". Sur l’utilisation de l’informatique, l’enseignant cite une étude menée auprès de 841 jeunes qui a prouvé "qu’une grande majorité a une utilisation extrêmement fréquente de Wikipédia mais qui ne les rend pas habiles dans l’évaluation de la fiabilité des sources, ils l’utilisent sans savoir comment cela se fabrique. L’école, qui forme les futurs citoyens, a donc un gros travail à faire dans ce domaine".

Fenêtres sur cours, n°417, 30 octobre 2015, 1€. 

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