L’enfant, le grand laissé pour compte des violences conjugales.
Paru dans Justice le vendredi 27 novembre 2009.
"Il faut considérer que loin d’être de simples témoins, les enfants sont victimes des violences au sein du couple. Ils doivent être pris en charge comme des victimes à part entière, au même titre que les conjoints", estime Karen Sadlier, lors d’une journée-colloque organisée le 26 novembre à Troyes, par le CIDFF (Centre d’information sur le droit des femmes et des familles). Karen Sadlier, docteur en psychologie clinique et directrice de l’unité de l’enfant au centre psycho-trauma (Institut de victimologie Paris 17ème), pointe du doigt le positionnement socio-judiciaire, éducatif et médico-psychologique le plus souvent adopté vis à vis de ces violences. Elle fait observer que le travail des professionnels va souvent, malgré toutes les bonnes intentions, à l'encontre les intérêts supérieurs des enfants. Elle s'oppose à "l’idéologie qui consiste à maintenir le lien familial à tout prix, ou à considérer les conjoints comme un couple parental davantage que comme un couple conjugal en difficulté".
La violence entre époux et la souffrance de l’enfant ne s’arrêtent pas avec la rupture du lien conjugal, a tenu à rappeler Karen Sadlier. "La violence se joue, dès la séparation, autour du lien qui maintient le couple en contact : L’enfant". Elle regrette de plus que les psychologues adoptent le plus fréquemment une posture "de neutralité bienveillante", c’est à dire qu’il ne prennent parti ni pour l’auteur des violences, ni pour la victime, ce qui constitue "une forme de réplique de la position tiraillée de l’enfant, incapable de choisir entre un parent ou l’autre". Elle conclut: "Maintenir le lien légal à tout prix ne fait que prolonger plus longtemps les souffrances de l'enfant", et compromet son avenir, notamment ses futures relations amoureuses, qui peuvent reproduire ce qu'il a connu.