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Midi-Pyrénées: l'Agenda d'accessibilité programmé des lycées (Ad'AP) sera réexaminé

Paru dans Scolaire le mardi 23 juin 2015.

Il est 13h30, hier lundi 22 mai 2015 à Toulouse, lorsqu'un petit attroupement d'une quinzaine de personnes dépose devant l'entrée principale du Conseil régional de Midi-Pyrénées un cercueil en carton noir. "M. Malvy", peut-on y lire, "Allez-vous enterrer l'accessibilité? Lycées accessibles: urgences! Ci-gît la loi de 2005". L'action a été menée au nom d'un collectif baptisé "pour une France accessible à tous" qui regroupe trente associations et organisations œuvrant pour les personnes en situation de handicap, dont le GIPH, l'APF, l'ADAPEI et l'ARAPEI mais également des organisations telles que la FCPE et la Ligue des droits de l'homme. Alors que les élus du conseil régional étaient réunis en assemblée plénière, ceux-ci dénonçaient le non respect des engagements pris par la Région pour la mise en accessibilité de tous les lycées.

Selon le collectif, alors qu'une échéance maximale de mise en accessibilité avait été actée en CRCPH (Conseil régional consultatif des personnes handicapées) pour 2019, l'Agenda d'accessibilité programmé des lycées (Ad'AP), soumis ensuite à l'approbation des élus en début de soirée, prévoyait le report de cette échéance à 2021. Le débat, initié notamment par le représentant du groupe EELV (Europe Écologie-Les Verts), François Simon, a abouti au report du projet d'Ad'Ap à la demande du président Martin Malvy, afin que le dossier "soit réexaminé pour voir ce qui peut être accéléré pour finir au plus tard à la rentrée 2020". Le projet doit être représenté à la session de septembre prochain.

"Mais que vaut la parole des élus?" s'étrangle Odile Maurin, la porte-parole du collectif et membre de l'APF (Association des paralysés de France). "Déjà, la loi de 2005 portait l'obligation d'accessibilité, sauf dérogations spécifiques, au 1er janvier 2015 et les collectivités n'ont pas fait leur boulot!" Elle explique que l'institution régionale avait par ailleurs entériné cet engagement en adoptant, en 2012, une programmation budgétaire pluriannuelle de mise en accessibilité de ces lycées sur la période 2013-2019. "Or", poursuit-elle, "j'ai découvert par hasard, parce que je suis membre du CESER (Conseil économique, social et environnemental régional) auquel ce rapport a été soumis, le report de cette échéance, initialement envisagée pour 2024 et rapportée à 2021 suite à la contestation".

Un diagnostic réalisé dès 2009

Des informations que confirme François Simon, le vice-président du conseil régional en charge des solidarités, également président du CRCPH. Celui-ci, qui juge "inacceptable" cette nouvelle échéance, évoquait le matin un "leurre": "la programmation pluriannuelle de mise en accessibilité a été votée fin 2012 pour démarrer en 2013 mais la Région n'a pas inscrit l'argent qui devait être utilisé entre 2013 et 2019, soit 83,4 millions d'euros, en autorisations de programme. Et j'ai découvert moi-même cette nouvelle échéance, sans en avoir été informé, lors d'une réunion du conseil consultatif en mai dernier lorsque les services de la Région sont venus présenter le nouveau plan". Un ensemble d'éléments qu'il a repris en assemblée en demandant notamment l'inscription des AP (autorisations de programme) dans le budget afin de "sacraliser l'engagement de la Région".

Pour le vice-président, cette décision est d'autant plus regrettable que la Région apparaissait, selon lui, comme un "modèle" en la matière. "Nous avons été l'une des premières à créer un conseil consultatif en 2008, nous avons réalisé un diagnostic d'accessibilité dans tous les lycées et CFA publics en 2009, nous avons été la deuxième après Île-de-France à adopter un agenda 22 en 2011, et nous avons voté en 2012 un plan pluriannuel pour lequel nous avions fait expertiser la totalité des travaux à faire. Si nous avions respecté ces engagements, nous serions encore modèle. Aujourd'hui, nous ne sont ni précurseur ni modèle!" "Les personnes handicapées ne sont pas des variables d'ajustement des contraintes budgétaires", ajoutait-il en assemblée. 

Un seul lycée accessible au sens de la loi de 2005 en Midi-Pyrénées

À ce jour, selon le collectif et le diagnostic établi en 2009, un seul lycée en Midi-Pyrénées est accessible au sens de la loi de 2005 sur les 132 bâtiments qui accueillent les 147 établissements publics dont 2 CFA. Ce report d'échéance serait d'autant plus dommageable, selon le collectif, que le passage du collège au lycée fait "disparaître du cursus 25 à 30% des élèves handicapés".

Au-delà de l'accessibilité "physique" des établissements, ces associations plaident aussi pour une accessibilité des formations: postes de travail accessibles en enseignement technique, accès aux malvoyants et aux malentendants, etc. Le diagnostic de 2009 a d'ailleurs souligné le faible nombre d'équipements "en rapport avec les handicaps visuels, auditifs et mentaux". "La liberté du choix de sa formation est parfaitement utopique", regrette Michel Subra, un membre de l'APF. "Et du fait des retards pris scolairement, on les cantonne dans les mêmes filières, notamment dans l'enseignement technologique. Le standard pour les non-voyants par exemple!" Pour lui, cette décision de prolonger l'échéance était motivée par "l'opportunité de la loi qui doit être votée à l'assemblée nationale en juillet prochain [et qui doit ratifier l'ordonnance du 26 septembre 2014 prévoyant de nouveaux délais, NDLR], loi qui autorisera cette échéance et permettra donc de lisser les coûts".

Pas de problème budgétaire mais des difficultés techniques selon la Région

Pour Martin Malvy, comme pour la rapporteure, Viviane Artigalas, vice-présidente en charge de l'enseignement secondaire et des TIC, le délai demandé ne dépendait pas d'une question budgétaire mais de problèmes techniques. Ainsi, trois établissements nécessiteront au moins 4 ans de travaux, sachant que ces derniers doivent être organisés "par tranches afin de respecter le déroulement des cours, des examens, etc.". Il ne s'agissait pas non plus, selon Viviane Artigalas, de voter une date d'achèvement des travaux mais le nombre de périodes sur lesquelles la Région s'engageait à mener ces derniers, "rien n'interdisant de finir avant". Pour autant, le rapport présenté hier programmait les travaux pour 47 établissements après 2019 (dont 12 pour juin 2021).

Le collectif, qui a déjà organisé depuis 2014 plusieurs actions revendicatives (blocages de péages, manifestations et rassemblements, opération escargot sur le périphérique, blocage de la préfecture et du tribunal de justice, courriers aux sénateurs et députés pour leur enjoindre de ne pas voter le texte qui doit ratifier l'ordonnance en juillet prochain à l'assemblée nationale), se déclarent prêt à mener d'autres actions si les associations ne sont pas entendues au niveau régional, et, "si la loi est maintenue en l’état", "à attaquer en justice au niveau national si les associations le peuvent", indique Odile Maurin.

L'Ad'AP prévoit des travaux de mise en conformité sur deux périodes de trois ans: la mise en conformité de 40 établissements, dont 2 CFA, d'ici 2018 et de 77 d'ici 2021. Ces travaux doivent être menés en tenant compte de plusieurs critères de "priorisation", sur lesquels les associations avaient donné leur aval, parmi lesquels un lycée accessible par bassin de formation et une typologie d'établissements offrant le plus grand nombre de formations (LGT/LPO). Sur le nombre d'établissements, la nature des travaux à réaliser comme les priorisations, rien ne doit être remis en cause. Martin Malvy a indiqué que l'engagement financier, prévu au PPT de 2012 avait été renforcé de 14,5 millions, pour pouvoir prendre en charge les travaux initialement prévus dans une 3e période 2021-2023 qui a ensuite été annulée, et que 504 bâtiments publics (hors lycées) avaient été accompagnés depuis 2009 pour leur mise en accessibilité.

Camille Pons

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