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"Oser devenir soi", une préoccupation de la jeunesse qui trouve à s'exprimer dans le fait religieux (colloque)

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture, Justice, Orientation le mardi 24 mars 2015.

La jeunesse peut se définir comme "une réticence à se dire adulte", à s'inscrire dans du "définitif", explique Cécile Van de Velde. Et Danièle Hervieu-Léger ajoute que chacun fait son "petit bricolage" et construit "son petit récit" loin "des orthodoxies prescrites par les institutions". Les deux sociologues intervenaient ce 24 mars en ouverture d'un colloque organisé par le CEFRELCO* sur "les jeunes et la religion".

Danièle Hervieu-Léger distingue, parmi la "petite minorité des croyants" chez les jeunes, la "toute petite minorité" des "rescapés de la transmission", ceux qui ont reçu une foi en héritage, et les autres, les "croyants flottants", qui ont construit leur propre système théologique, comme cette jeune fille qui participe aux JMJ (journées mondiales de la jeunesse), qui s'affirme donc catholique, et qui demande à un évêque quel est le mot chrétien pour réincarnation ! La sociologue insiste sur l'importance de la figure du converti, celui qui choisit sa religion, ou du "born again", qui choisit de revenir à une tradition un peu oubliée. En même temps, ces jeunes suivent "leur petit chemin tout seuls, mais avec d'autres", ils sont à la recherche de communautés où "partager des certitudes". Et, dit-elle, ces phénomènes se retrouvent dans toutes les traditions religieuses, aussi chez les musulmans que chez les juifs, les évangéliques ou les catholiques...

Les conversions, des évènements par paliers, comme un accomplissement de soi

Cécile Van de Velde évoque pour sa part la difficulté à définir la jeunesse, sinon par un certain nombre de colères et d'aspirations qui se retrouvent un peu partout dans le monde, et se traduisent par "une tension existentielle", une volonté de "choisir sa vie", qui se retrouve en négatif par exemple dans le mouvement des indignés, qui dénoncent l'échec de la méritocratie, quand "le privilège" d'avoir fait des études devient "un piège", ou quand l'héritage transmis par la génération précédente est "trop lourd à porter". Cette jeunesse revendique le droit à la parole, dénonce au nom de la démocratie, la démocratie représentative, et s'inscrit dans "l'ultra local" où elle peut se faire entendre.

C'est dans ce contexte que l'historien Charles Mercier s'interroge sur le succès des JMJ. Au lieu de proposer aux jeunes de fuir le monde, de renoncer à soi, les trois derniers papes leur présentent la foi comme "un accomplissement de soi". Et la conversion n'apparaît pas comme un évènement soudain, mais comme "un processus graduel". De même à propos des jeunes musulmans qui basculent dans la violence, Omero Marongiu-Perria ne croit pas aux thèses habituellement véhiculées sur l'auto-radicalisation de jeunes désoeuvrés et désocialisés. "Ils ne sont pas si désoeuvrés ni en rupture scolaire que ça !" Certes, certains jeunes se convertissent à l'Islam, mais ils ne sont pas majoritaires si on pense aux familles qui ont contacté le CPDSI (le centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'Islam, animé par Dounia Bouzar). Même s'il présente prudemment ses recherches comme des hypothèses, et s'il s'interdit tout jugement de valeur, le sociologue évoque comme son collègue historien des "passages par paliers" avec "un arrière fond spécifique à l'Islam contemporain", où, dans la plupart des mosquées, les imams se réfèrent aux catégories coraniques et à la situation de la péninsule arabique au VIIème siècle, quand le prophète combattait "l'impureté" et refusait toute altérité. C'est "un discours qui est plus souvent véhiculé qu'on ne le dit", et Daesh apparaît dès lors à beaucoup comme faisant une "mauvaise application" de la charia, comme "exagérant". Ce phénomène n'est donc pas "radicalement nouveau" et se situe dans "un univers de sens prédominant" déjà radical.

* Centre d'étude du fait religieux contemporain (ici). Voir aussi "Fait religieux.com" (ici)

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