Les "devoirs envers Dieu" ont été enseignés par l'école laïque (C. Lelièvre)
Paru dans Scolaire le lundi 12 janvier 2015.
"L'histoire (tarabiscotée mais d'autant plus significative) des 'devoirs envers Dieu' dans les programmes de l'école primaire publique commence en 1882 et dure jusqu'au régime de Vichy", explique Claude Lelièvre dans une tribune publiée le surlendemain des attentats visant Charlie Hebdo pour cause de blasphème. Le spécialiste de l'histoire scolaire rappelle que Jules Ferry avait refusé que soit introduite cette notion dans la loi de 1882 sur l'obligation scolaire et la laïcité des écoles primaires publiques, mais elle figure pourtant dans le programme de morale publié juste après. Le ministre a laissé faire le Conseil supérieur de l'Instruction publique, "composé surtout d'universitaires spiritualistes- donc déistes - à l'image de ce qu'étaient alors plupart des enseignants de l'Ecole publique".
Ces "devoirs" sont limités "à deux points, "ne pas prononcer légèrement le nom de Dieu" et associer "à l'idée de la Cause première et de l'Etre parfait un sentiment de respect et de vénération", quelle que soit la religion de l'élève : "l'instituteur s'attache à faire comprendre et sentir à l'enfant que le premier hommage qu'il doit à la divinité, c'est l'obéissance aux lois de Dieu telles que les lui révèlent sa conscience et sa raison."
En 1901, la Ligue de l'enseignement propose que cet enseignement soit supprimé des programmes de l'école primaire laïque, ce que refuse Ferdinand Buisson. En 1923, il est supprimé par le directeur de l'enseignement primaire, sans que le ministre, Léon Bérard, en soit prévenu. Il est aussitôt rétabli. En mars 1941, sous Vichy donc, Jérome Carcopino remplace les "devoirs envers Dieu" par "les valeurs spirituelles, la Patrie, la civilisation chrétienne" qui disparaissent à la Libération. "Durant une soixantaine d'années auparavant, l'école républicaine et laïque a eu au programme l'enseignement des "devoirs envers Dieu" sans problèmes ou états d'âme majeurs (...). Sidérant, non ?"
Le tribune de Claude Lelièvre ici.